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Édito
par Thomas Mourier - le 3/07/2023
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par Thomas Mourier - le 3/07/2023

“Ce qui m’intéresse le plus ce sont les relations humaines” D’Avant l’oubli à Astra Nova Lisa Blumen dévoile sa science-fiction sensitive & poétique. 

Après le très remarqué Avant l’oubli en 2021, Lisa Blumen revient cette année avec un nouvel album, cette fois en couleur, Astra Nova. Une histoire très connectée aux enjeux actuels, qui nous entraîne dans une science-fiction contemplative où les relations humaines transcendent les enjeux cosmiques.

Autoportrait ©Lisa Blumen

Entretien avec l’autrice autour de ces deux albums pour parler des livres, de technique et de son travail en général. Pour accompagner cette discussion, quelques planches choisies et des extraits des recherches que la dessinatrice nous a confiées pour l’occasion.

Avec ces galaxies tout en pointillé au feutre, ces scènes de fêtes douces-amères, ces scènes d’enterrement viking version 21e siècle ou son héroïne solitaire, Astra Nova détonne dans le flux des sorties et mérite qu’on s’y arrête un moment en compagnie de son autrice pour explorer cet album riche et singulier.

Astra Nova installe une science-fiction contemplative, une vision nostalgique d’un futur qui n’existe pas et pas si désirable finalement ?

Lisa Blumen : Oui, c’est peut-être juste qu’en ce moment le futur ne fait pas trop rêver. J’ai l’impression qu’on n’est plus du tout dans les utopies futuristes, scientifiques ou robotiques qu’il y avait avant, cette science-fiction rétro futuriste des années cinquante.

Je pense qu’on a plus trop ces idées-là, on est un peu moins utopiques, mais oui, c’est un peu ça l’idée. Après, je n’ai pas non plus envie de partir dans quelque chose de trop politique, parce que ce n’était pas le sujet de la bande dessinée, mais évidemment qu’il y a des petites touches. Mais c’est ça qui est assez chouette dans la science-fiction je trouve : c’est un peu un prétexte pour parler de plein d’autres choses.

Mais c’était un peu plus évident pour moi de mettre des petites piques qui vont un tout petit peu plus loin que ce qui existe déjà ; avec ces voitures par exemple, qui se conduisent avec des robots ou le petit slogan « pour plus de sécurité, préférez les robots »…

En ce moment, je prépare une expo à l’ADAGP [plus d’infos en fin d’article], une exposition sur le lore qui existe entre les deux albums et donc là ça parle plus de science-fiction. J’exploite ce qui existe déjà et je vais juste un peu plus loin et on se rend compte que c’est ça qui est un peu flippant.

En se préparant pour ce voyage, Nova confronte son ambition face à celle de ses amis, on a l’impression que le progrès technique ne gomme pas la solitude ? On a toujours besoin des autres ?

L.B. : Dans les deux albums, je jette un peu de la poudre aux yeux en disant « hé il va y avoir des fusées, ah ça va être la fin du monde » et finalement ça ne parle pas du tout de ça, ce qui m’intéresse le plus ce sont les relations humaines. Et j’ai l’impression qu’à n’importe quelle époque, c’est ça qui compte vraiment, et c’est ça que je voulais montrer. 

Je ne dirais pas que les choses ont spécialement changé par rapport aux nouvelles technologies. On reste toujours humain, même si plein de choses évoluent, comme en ce moment, c’est peut-être aussi en ce moment qu’il faut se questionner là-dessus. Qu’est-ce qui compte vraiment ? Qu’est-ce qui est important ? 

Si la solitude est au cœur du livre, elle est étrangement balancée par la surveillance. Comme Thomas Pesquet lors de ses dernières missions, tout à l’air filmé en permanence, pourquoi lier ces 2 angles ? 

© Lisa Blumen/ Editions l’Employé du moi

L.B. : C’est amusant parce qu’au départ, je voulais que la villa soit comme les villas de téléréalité, un peu filmée, je voulais peut-être que l’agence spatiale les surveille pour voir si la mission se passe bien ou pas… Finalement je ne l’ai pas fait. Mais c’est amusant parce qu’il y a pas mal de gens qui le pensent.

Il y a cette idée que même si on s’entoure de plein de choses, de plein de gens, on est quand même toujours un peu seul. C’est le constat un peu triste que fait la mère de Nova. Et c’est quelque chose que ma mère m’avait vraiment dit. C’est un truc qui m’est vraiment resté ! À l’époque, je trouvais ça vraiment terrible cette phrase : « Dans la vie, on est toujours seul », c’est vraiment super triste. J’ai l’impression que c’est un peu un constat qu’on fait à un moment et qu’il faut le surpasser, dans le sens où il n’y a pas de problème à être seul. Même s’il faut quand même essayer de trouver des liens avec la réalité et on peut être seul avec les autres, comme on peut ne pas se sentir seul quand on est seul.

Dans Avant l’oubli, on a la mise en scène d’une fête sur fond de tragédie, une fête de fin du monde puis une fête d’adieu, c’est une mise en scène qui permet de faire vivre les personnages dans des situations difficiles ? De mettre en image des dialogues ? 

Illustrations © Lisa Blumen/ Editions l’Employé du moi

L.B. : La fête est un élément important. C’est amusant parce que le prochain numéro de Kiblind magazine sera un numéro spécial fêtes et ils m’ont interrogé à ce sujet et en fait je n’avais même pas remarqué que dans les deux histoires, il y avait une fête.

Dans mes histoires, ce qui m’intéresse le plus, c’est quand le personnage lâche quelque chose. Dans Avant l’oubli « c’est la fin du monde on ne peut rien faire, et puis merde, on va vivre pour de vrai. » Et dans Astra Nova, c’est « Je vais partir et je n’ai pas d’autre choix que d’être avec mes amis et de passer un bon moment donc on va en profiter quand même. » Ce sont ces moments-là qui me paraissent intéressants et je trouve qu’il y a vraiment ça dans la fête.

C’est amusant la façon dont on peut faire la fête. On peut faire la fête quand on est très joyeux, parce qu’on a une super nouvelle, et on peut aussi faire la fête parce que ça ne va vraiment pas. Et moi en l’occurrence, c’est plutôt de cette façon-là que je fais la fête. Ce n’est pas toujours très sain… [rires], mais c’est le moment où on lâche, on s’amuse et là on vit des choses qui sont intenses et denses qu’on ne pourrait peut-être pas s’autoriser si tout allait bien.

On a besoin de lâcher quand la tension devient trop forte et la fête, c’est tellement important pour ça, pour s’oublier, pour être avec les autres même des gens qu’on ne connaît pas, qu’on n’aurait pas trop l’occasion de connaître autrement. Je reste souvent dans des situations intimes, on se rapproche très près des personnages, on est vraiment avec eux.

Les moments de fête, c’est aussi pour moi, le moment de relâcher dans le dessin, de m’amuser et de faire des gens qui bougent, qui dansent, qui font du bruit… C’est important pour moi, dans les albums, d’avoir ces moments-là pour relâcher mon dessin et aussi ma concentration, parce que les albums sont parfois très lourds à porter, ils ne sont pas toujours très joyeux.

J’essaye toujours de ne pas faire des choses trop lourdes, même si les sujets le sont : solitude ou fin du monde. J’aime bien jongler avec tout ça et essayer d’apporter de la vie, de représenter la vie le plus justement possible. Parfois tu peux apprendre une super mauvaise nouvelle et avoir juste à côté quelqu’un qui fait un truc trop marrant. C’est pour ça que dans les films où tout est triste, où tout est trop beau, je trouve que ça représente assez mal la vraie vie. Donc la fête ça permet aussi d’avoir cette facette dans mes histoires.

Les personnages ont plusieurs facettes justement, de Alan, la drag queen, et son maquillage très graphique à la combinaison très organique de Nova, tu as longtemps cherché le ton, les designs ? 

© Lisa Blumen/ Editions l’Employé du moi

L.B. : Ils sont venus assez vite. En général, ils viennent quand même assez vite, c’est pour ça que je ne fais pas beaucoup de croquis. Je m’étonne à chaque fois, je me dis que je suis une grosse feignasse [rires], mais c’est assez récurrent dans mon travail, à chaque fois le premier geste est souvent le meilleur. Quand j’essaie d’en faire d’autres, ça marche moins bien. Évidemment, il faut de l’entraînement, mais en termes d’inspiration, de création pure, c’est la première idée la meilleure.

Mais ils sont venus assez vite, j’avais fait des petits croquis, surtout pour définir leur personnalité. C’est à partir de ça que je me suis basée pour les dessiner. Ce qui est amusant, c’est que pour Allan, j’ai repris le visage d’un ami à moi — je lui ai demandé avant parce que j’adore sa tête — j’avais vraiment envie de le reprendre. Et l’autre personnage, Ulysse, je l’ai trouvé, mais sans faire exprès, il ressemble à un autre ami à moi. Mais je ne m’en suis pas rendu compte, c’est amusant. C’est peut-être parce que j’avais envie de faire quelque chose sur l’amitié donc je me suis inspiré d’amis à moi. Pas forcément dans leur caractère. 

À chaque fois que je pense à des trucs qu’ont dit mes amis ou des gens que je connais : je sens que ça va guider le personnage dans la façon dont je vais le créer.

Recherches © Lisa Blumen

Pour cette histoire, j’ai essayé de trouver des signes astrologiques aux personnages. Je ne veux pas paraître mystique, mais ça permet de définir une personnalité. Le signe astrologique, c’est plutôt pas mal pour arriver à décrire un peu un personnage.

Et graphiquement ils sont venus assez vite en fonction de leur personnalité. Nova a un physique très fin, très sec, tout en rigueur et en lignes droites alors que par exemple Iseult est beaucoup plus généreuse, on a envie de lui faire un câlin, quoi.

Le costume de Nova, ressemble à celui des policiers dans Avant l’oubli, auquel on aurait retiré les gants et les bottes, c’est volontaire ? 

L.B. : Je suis contente que tu l’aies vu parce que je voulais qu’il y ait cette continuité entre les deux histoires ; que tout ce qui représente l’autorité, soit dans des combis blanches moulantes. Dans Avant l’oubli, je trouve qu’ils sont dans des espèces de trucs S.M. avec leurs gants en cuir… et du coup je les trouve un peu ridicules avec les petites boules sur la tête — d’ailleurs Nova à ce petit chignon aussi. 

À la beauté de l’espace fait face le carrelage de piscine de l’Agence spatiale, à l’exubérance de la villa où elle fête ses derniers jours sur terre, s’oppose la forêt sauvage, j’ai l’impression que ces paysages forts s’invitent avec la couleur, après Avant l’oubli plus minimaliste ? 

© Lisa Blumen/ Editions l’Employé du moi

L.B. : Pour l’espace, oui, c’était une petite trouvaille qui m’amusait bien. Ce n’est pas moi qui ai inventé les trucs pointillistes, mais j’ai l’impression de ne pas avoir trop vu ça en feutre, donc assez content de l’effet que ça faisait.

C’est vrai que ces pages sont esthétiquement assez plaisantes ; c’était pour moi, pour m’amuser dans le dessin. J’avais envie d’essayer depuis longtemps les feutres. J’ai fait un album jeunesse, La vérité sur les fantômes, au feutre. Et c’est une technique qui me plaît bien. 

Pour Avant l’oubli, je n’avais pas envie de faire ça parce que c’était très long, c’est 250 pages, et on a trouvé quelque chose avec l’éditeur qui me plaisait bien : cette idée d’évanescence avec des couleurs pastel très effacées. Comme si la lune était tellement près, qu’elle effaçait un peu toutes les couleurs, tellement il y avait de lumière.

Pour Astra Nova, c’était un autre concept puisque je voulais que ça se passe de nuit, il fallait plus d’ombres, que ce soit plus précis dans les couleurs, plus réalistes… et c’était aussi un challenge pour moi de voir si j’arrive à tenir ça sur un album. 

Et au niveau des outils, tu travailles comment ? Uniquement aux feutres ? Tu retouches au numérique après ? 

L.B. : Non, je dessine au crayon de papier. Ensuite je scanne et j’imprime mon trait, au cas où je me plante avec les feutres. Du coup je repasse sur l’impression. J’en profite pour booster un peu le noir du crayon avant d’imprimer.

Je voulais qu’il y ait un photograveur sur le projet, parce que je ne me sentais pas trop de faire des scans de feutres. J’avais peur que ce soit compliqué, mais finalement on n’a pas tant retouché que ça. Les couleurs sont quand même un peu plus grises que les originaux, mais c’est un peu le jeu de l’impression, c’est jamais exactement pareil. Mais au final pas tant de retouches après.

Recherches © Lisa Blumen

Il y a aussi des doubles planches de paysages, travaillées sans trait cerné, qui proposent une narration parallèle qui éclaire la fin, comment sont-elles arrivées dans l’histoire ?

L.B. : C’était quelque chose que j’avais eu depuis assez longtemps en tête. Ce sont des enterrements vikings que je voulais mettre dans Avant l’oubli déjà, mais ça ne marchait pas vraiment. 

J’étais tombé sur un documentaire, et j’ai trouvé ça tellement beau et triste de construire tout un bateau pour le brûler après. Mais en même temps, ça a vraiment de la gueule comme enterrement, c’était vraiment une image qui me plaisait.

© Lisa Blumen/ Editions l’Employé du moi

En fait, je me demande si cette image que j’avais en tête depuis longtemps, n’a pas influencé l’histoire d’Astra Nova. Souvent j’ai des images clefs quand je réfléchis une histoire, celle-là était là depuis le début, c’est la métaphore de ce que Nova est en train de vivre : elle construit tout son avenir et se rend compte, au bout d’un moment, qu’en fait ça ne sert à rien. Contrairement aux enterrements vikings, où les gens sont déjà morts, elle construit son propre cercueil. 

Cette histoire parle aussi de dépression et de suicide, ce n’est pas très joyeux, mais c’est aussi une histoire d’amitié, où comment on empêche quelqu’un d’abandonner. C’est plus compliqué que ça, mais c’est trouver comment on remet quelqu’un dans la vie.

Ce radeau, c’était pour parler de ça et en même temps, ça me permettait de faire des coupures dans l’histoire parce que c’est un huis clos où il n’y a que des dialogues. Déjà c’est très pénible à dessiner parce que c’est toujours les mêmes décors et mêmes personnages et c’est important qu’il y ait des respirations.

En parlant de respirations, tu joues pas mal avec les cadrages dans ton découpage, on a des cases isolées dans une pleine page ou ces doubles pages ; il y a des zooms sur l’infiniment petit alors qu’on parle de l’espace… Comment travailles-tu ton story-board ? 

© Lisa Blumen/ Editions l’Employé du moi

L.B. : Ça change à chaque projet. Pour Avant l’oubli je n’ai pas fait de story-board et pour Astra Nova j’ai fait un story-board que j’ai repris trois fois entièrement. Pour ma prochaine histoire, j’écris d’abord et je ferai le story-board après. 

Tout ce qui est cadrage ou rythme, ça vient un peu progressivement dans le story-board et surtout comme cette histoire, ce sont que des dialogues quasiment, c’est très dur à représenter. Pour que ce soit intéressant à l’image il ne faut pas qu’il y ait que des têtes qui parlent.

C’est un challenge parce qu’il faut montrer autre chose pour renforcer l’idée de ce que les personnes sont en train de dire. C’est assez difficile, mais vraiment très intéressant, j’ai l’impression que ça m’a appris beaucoup de choses sur la façon de raconter une histoire.

Par exemple, cette histoire de fourmis, c’est venu presque à la fin, cette idée de parler de trucs techniques en montrant des images de nature : en fait, il y a déjà de la technologie dans la nature. C’est là que ça devient intéressant, l’image va dire encore plus que le texte.

Avec ton écriture, tu travailles de manière linéaire ou par séquences clefs ? 

© Lisa Blumen/ Editions l’Employé du moi

L.B. : Plutôt de manière linéaire. Comme je disais, je reviens beaucoup sur le story-board et en l’occurrence j’y suis revenue trois fois. Il y avait des choses qui ne marchaient pas, l’histoire a beaucoup évolué. 

Au départ, je veux trop en dire —c’est un peu l’écueil de beaucoup de gens, c’est normal— et le gros travail, c’est d’éliminer pour qu’il reste une idée forte. Ensuite, rejoint par plein d’autres petites idées, c’est compliqué dans une histoire d’avoir plus d’une grosse idée, sinon, on part dans tous les sens et on n’a pas le temps de développer l’idée qui nous intéresse vraiment.

Je reprends beaucoup, mais une fois que j’ai mon histoire, je reprends beaucoup les dialogues. Je les lis à voix haute, je change si le personnage a évolué dans l’histoire. J’aime bien ce moment-là, j’ai l’impression que c’est le personnage qui me dit ce qu’il doit dire, ce n’est plus moi qui parle vraiment, c’est lui.

Pour que l’histoire soit fluide, c’est hyper important de la faire dans l’ordre, sinon les liaisons vont être un peu bizarres. Le moment où j’ai l’histoire et que je la reprends, je la modifie, c’est le moment où je découvre des trucs, que tout prend forme. Ça doit être vachement intéressant d’être script doctor par exemple. C’est presque mécanique de comprendre comment ça marche.

Est-ce que tu veux nous parler de tes prochains projets ? 

© Lisa Blumen/ Editions l’Employé du moi

L.B. : Je peux dire que ce ne sera pas de la science-fiction. Même si je crois que ça parlera encore un peu de solitude…

Ça sera sur une influenceuse beauté, donc un truc radicalement différent. J’aimerais bien que ce soit un peu un thriller, encore un autre genre. J’aime bien jouer avec le genre pour en fait parler encore de choses intimes et finalement toujours la même chose [rires] j’ai l’impression que ça va être complètement différent. Mais pour Astra Nova j’avais l’impression que ça allait être complètement différent déjà [rires].

Je pense que ce sera en couleur, je fais beaucoup de recherches et ça me prend pas mal de temps, du coup je ne sais pas du tout quand elle va prendre forme. 

Merci Lisa d’avoir pris le temps d’explorer ces deux albums avec nous. Si vous voulez en savoir plus, je vous invite à découvrir l’exposition LORE du 5 juillet au 18 août 2023 dans les locaux de lʼADAGP (11 Rue Duguay Trouin, 75006 Paris, expo gratuite, sur rendez-vous uniquement : adagp@adagp.fr) sans oublier demain mardi 4 juillet, vernissage en présence de l’artiste entre 18h00 et 20h30.

Astra Nova de Lisa Blumen, l’Employé du moi
Avant l’oubli de Lisa Blumen, l’Employé du moi


© Lisa Blumen/ Editions l’Employé du moi

Recherches © Lisa Blumen
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