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Incontournables
par Thomas Mourier - le 13/12/2018
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par Thomas Mourier - le 13/12/2018

Top 18 pour 2018, le meilleur de l’année

Ils sont partout, les tops et les indispensables de l’année, entre sélections annuelles du Festival de la BD d’Angoulême, le Prix de l’ACBD ou du Prix des Libraires de Bande Dessinée Canal BD,… Difficile de faire un choix tant 2018 à été riche de belles sorties et bonnes surprises.Laissons de côté une partie des meilleures ventes… Lire la Suite →

Ils sont partout, les tops et les indispensables de l’année, entre sélections annuelles du Festival de la BD d’Angoulême, le Prix de l’ACBD ou du Prix des Libraires de Bande Dessinée Canal BD,… Difficile de faire un choix tant 2018 à été riche de belles sorties et bonnes surprises.
Laissons de côté une partie des meilleures ventes ou les ténors de l’imprimerie pour vous proposer notre sélection perso, des albums les plus intrigants, pertinents, innovants et enthousiasmants de l’année.
Voici notre Top 18 pour 2018 !

💡 Il est certain que cette sélection ne représente qu’une partie des sorties, et on peut y lire en creux les manques et les grands absents. Aussi on vous propose d’ajouter votre top en commentaire de cet article ou sur le groupe Bubble pour en parler avec ses 1600 membres.

Au sommaire de ce top 📰

📚#BD Indélébiles de Luz, Futuropolis
🗽#Comics Moi ce que j’aime c’est les monstres T1 d’Emil Ferris, Monsieur Toussaint L’ouverture
👺#Manga Kingdom de Yasuhisa Hara, Meian
📚#BD Charlotte impératrice T1 de Matthieu Bonhomme & Fabien Nury, Dargaud
🗽#Comics X-Men Grand Design d’Ed Piskor, Panini Comics
📚#BD L’arabe du futur T4 de Riad Sattouf, Allary
🗽#Comics Batman White Knight de Sean Murphy & Matt Hollingsworth, Urban Comics
👺#Manga Rien ne fera venir le jour de Yoshihiro Tatsumi, Cornelius
📚#BD L’âge d’or T1 de Cyril Pedrosa & Roxanne Moreil, Dupuis
🗽#Comics Andy, Un conte de faits de Typex, Casterman
👺#Manga The Promised Neverland T1 de Kaiu Shirai et Posuka Demizu, Kazé
📚#BD Les Grands espaces de Catherine Meurisse, Dargaud
🗽#Comics Sheriff of Babylone de Tom King & Mitch Gerads, Urban Comics
👺#Manga L’homme sans talent de Yoshiharu Tsuge, Atrabile
📚#BD Spirou ou l’espoir malgré tout d’Émile Bravo, Dupuis
🗽#Comics I kill Giants de Joe Kelly & Ken Niimura, Hi Comics
📚#BD ll faut flinguer Ramirez T1 de Nicolas Petrimaux, Glénat
📚#BD Ailefroide, altitude 3954 de Jean-Marc Rochette et Olivier Bocquet, Casterman

#BD
Indélébiles de Luz, Futuropolis 

Recueil de souvenirs, déclaration d’amour, copinage, privates jokes, éveil à la politique et réflexions sur le dessin, Indélébiles doit autant à l’encre qui tatoue les doigts du dessinateur qu’à la mémoire de ces grands dessinateurs disparus en janvier 2015. Luz choisit des moments intimes avec ses amis, et laisse de côté les tensions et les crises qui ont été racontées et commentées par d’autres. Un livre sur l’amitié et l’aventure collective d’un journal devenu une référence pour plusieurs générations de lecteurs (et d’auteurs.)
L’ancien dessinateur de Charlie Hebdo raconte ses souvenirs à la rédaction du journal qui a occupé 23 ans de sa vie. Ayant échappé aux attentats qui ont touché une partie de ses amis (épisode terrible qu’il évoque dans un album précédent Catharsis), il choisit dans ce livre de souvenirs très drôle et touchant de revenir sur la période Charlie, de sa rencontre décisive avec Cabu ou encore de ce qui aurait pu, aurait dû être son ultime Une sur Johnny. 
À travers son parcours, ses premières tentatives, ses reportages, ses journées à la rédaction, Luz nous fait revivre des instants, des moments futiles ou puissants qui permettent d’entrevoir les coulisses de ce monde disparu. Autour de la figure de Jean Cabu, mentor et ami, Luz apprend les ficelles du métier, mais aussi celle de Gébé, toujours philosophe et piquant, son amitié avec Charb, les frasques de Tignous… et c’est à leurs côtés qu’il va devenir l’un des plus grands dessinateurs de presse du canard.
Et de dessin il en est question à travers les dialogues ou du trait, le plaisir du dessin ou la quête du « bon » dessin. Il s’essaie à plusieurs techniques, ses caricatures se font plus précises pour faire le portrait de ses amis ou de moments forts de la rédaction. Son trait élastique change, la couleur s’invite face au noir & blanc ou blanc sur noir et il alterne entre les dessins épais au marqueur et les détails à la pointe fine. Toujours pleins d’humour, de détails absurdes, le style de Luz se fait plus réaliste pour cet album et alterne les premiers plans entre portraits chiadés ou mouvements personnifiés.
Plus de 300 pages d’humour et de tendresse (au milieu de blagues potaches et de sexes dessinés à toutes les sauces, on vous rassure) où Luz à su trouver le ton juste, le bon dessin pour convoquer tous les sentiments, le passé et le présent pour l’un des plus beaux livres de l’année.

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#Comics 
Moi ce que j’aime c’est les monstres T1 d’Emil Ferris, Monsieur Toussaint L’ouverture

L’album vient de recevoir le grand prix de la critique ACBD 2019 et il était le livre le plus attendu de l’année. Événement double en France, car ce chef-d’œuvre est le premier livre de l’Américaine Emil Ferris et il est publié par un éditeur qui se lance dans la bande dessinée après avoir sorti quelques pépites dans le domaine de la littérature étrangère. Monsieur Toussaint L’ouverture soigne ses livres et cette très belle édition met en valeur le travail de la dessinatrice qui utilise stylos billes, crayons, feutres sur des pages de cahiers spiralés au lignes tracées. L’artifice du journal intime reproduit permet à l’auteur de laisser parler Karen, la narratrice, à la première personne et de présenter ce travail comme le carnet d’une jeune fille de dix ans passionnée de récits d’épouvantes vivant à Chicago dans les années 60. Un jeu du vrai et du faux qui se prolonge dans la fiction à travers cette enquête à plusieurs niveaux à la poursuite de l’assassin de la voisine du dessus. Roman d’apprentissage, carnet dessiné & annoté parle des vrais monstres : les humains, derrière les masques de loups-garous, fantômes et autres goules.
Mais les monstres ne sont pas dangereux même s’ils sont effrayants, ce sont ces villageois armés de torches qui ont peur qui sont le vrai danger : de l’avènement du 3e Reich et les camps à l’assassinat de Martin Luther King, du racisme banalisé à la violence ordinaire, le quotidien de cette jeune fille résonne autour de ces problématiques contemporaines et sociétales autant que sa propre exploration de soi, de la sexualité, de l’amitié, de l’art… Moi ce que j’aime c’est les monstres, un roman monde sur plus de 400 pages, touchant et sincère doublé d’un travail graphique rare et qui ne laisse pas indifférent. Un roman graphique comme on aimerait en lire plus souvent, premier volume d’un diptyque dont le second volet est prévu pour la fin d’année 2019 en VO. Difficile d’attendre si longtemps, heureusement qu’on peut relire ce premier tome et toujours y trouver quelque chose de nouveau.

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#Manga
Kingdom de Yasuhisa Hara, Meian

Kingdom est l’un des rares blockbuster qui n’avaient pas encore été traduits en France, malgré son succès dans l’archipel. Avec 52 tomes déjà parus, cette série très populaire au Japon arrive chez nous par le biais d’un nouvel éditeur Meian, avec l’intention de rattraper la version japonaise au rythme de 4 volumes tous les 2 mois. Une série d’envergure qui se densifie et se complexifie au fil des différents arcs narratifs, prenant pour base les guerres entre les différents royaumes de Chine avant l’avènement de la dynastie Qin. Une guerre séculaire connue sous le nom de Royaumes combattants : période de batailles très élaborées, d’innovations militaires et administratives à l’heure où l’Empire Romain attaquait la même chose en Europe. Personnages historiques, batailles marquantes, complots géants, mais aussi fiction à travers le destin du jeune Shin et ses compagnons. Si le manga démarre un peu comme un nekketsu (canevas classique du manga d’aventure avec son héros qui veut devenir le meilleur/se venger, etc.) il tend vers plus de noirceur et de réalisme que les gamins turbulents du prologue.
Si les dessins ne sont pas fous, au fil des chapitres on sent une belle évolution, surtout sur la mise en scène et le choix des cadrages, et l’ensemble tend à se bonifier. L’auteur ayant tiré parti de conseils de ses pairs parmi les plus prestigieux et le style de Yasuhisa Hara de s’affirme : plus noir, plus dense, l’univers s’étoffe pour accompagner cette saga au long court dont les éléments se mettent très vite en place. Pas mal de violence, de combats au milieu de toutes ces incursions historiques et flash-back qui donnent au final un manga composite et intrigant. Début d’un nouveau succès en France aussi on l’espère, mais le démarrage a été fort pour les deux premiers tomes. On y croit.

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#BD
Charotte impératrice T1 de Matthieu Bonhomme & Fabien Nury, Dargaud 

Si vous êtes fan comme moi du trait et des univers de Matthieu Bonhomme, bonne nouvelle, le dessinateur multiplie les heureuses collaborations. Après un album solo sur L’Homme qui tua Lucky Luke, il publie avec Fabien Nury une fiction inspirée de la vie de Charlotte de Belgique, une princesse qui fut au centre de plusieurs grands complots du début du XXe siècle.
Le scénariste d’Il était une fois en France et de La Mort de Staline est un habitué des intrigues sombres qui se coulent dans les grandes lignes de l’Histoire, et cette nouvelle série démarre sous les meilleurs auspices. Les auteurs dévoilent les premières années du destin improbable de celle qui sera impératrice du Mexique avec toute la grâce du trait de Matthieu Bonhomme. Un dessin plutôt classique au premier abord qui dévoile des trésors de minutie et de trouvailles graphiques. Le dessinateur du Marquis d’Anaon (Lire l’incontournable) nous surprend par son utilisation forte de la couleur comme élément de narration ou des cadrages audacieux qui donnent au livre une identité forte avant même d’avoir commencé la lecture.
De très belles planches pleines de tensions et d’humour à travers les dialogues piquants qui jalonnent les situations dramatiques (Sisi impératrice en mode racaille des beaux quartiers est assez génial.). Comme souvent, ces personnages puissants sont des marionnettes dans les mains de personnes qui le sont encore plus. Charlotte et Ferdinand-Maximilien vont en faire les frais malgré leurs prétentions royales et intellectuelles. La bonne idée est bien sûr d’avoir pris le parti de raconter cette période historique du point de vue de la jeune femme avec tout ce que cela implique et d’en avoir fait un personnage fort à travers ses faiblesses et sa détermination. On espère que les auteurs mettront autant de passion dans la suite, l’attente vaut le coup.

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#Comics
X-Men Grand Design d’Ed Piskor, Panini Comics

L’album providentiel, celui qu’on n’attendait pas mais qui est parfait. « Encore une variation sur ces super-héros qu’on a vus mille fois, à toutes les sauces et dans toutes les combinaisons possibles », allez-vous me dire… Mais non, le génial Ed Piskor redessine entièrement la saga à travers une quête qui tient autant de la réécriture que du résumé. Avec son style vintage et post-moderne, il fait le lien entre tous les épisodes et arcs importants de la série sous forme d’une mini-série sur les origines du Phénix et son influence sur le titre. 
Venu de l’underground, ayant travaillé avec Harvey Pekar, on sent dans le trait, les expressions ou les choix de certains plans, l’influence de cette école Crumb & Kurtzman. Le reste emprunte aux comics de l’âge d’or et aux planches de Jack Kirby. L’auteur de Hip Hop Family Tree frappe fort,et on se permet une parenthèse sur cette série remarquable qui raconte de manière documenté, et pleine d’anecdotes, l’histoire du Hip hop, de son apparition dans les rues de New York à son succès planétaire. Il met en scène les grandes figures du mouvement, les artistes et les labels qui ont marqué l’Histoire dans un style emprunté aux comics, travaillant son dessin et ses couleurs pour obtenir un côté pop & old school qui colle parfaitement au sujet. Déjà trois volumes parus en France chez Papa Guédé édition et la série est prévue en 4 volumes (peut être plus…)
Retour aux X-Men. Aussi accessible pour des lecteurs qui souhaiteraient se mettre au comics que pour des fans vétérans qui y verront de nombreux clins d’œil et tours de passe-passe entre les séries. Si le dessinateur repart de zéro pour dérouler les moments importants de la vie des mutants, chaque page ou dialogue sont documentés, étayés, justifiés par des références qu’il glisse en fin d’album. Autant un travail artistique que patrimonial à travers cette trilogie qui détonne dans le flot habituel de parutions Marvel. Le livre mutant par excellence.

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#BD
L’arabe du futur T4 de Riad Sattouf, Allary

Nous en avons parlé plusieurs fois sur Bubble, l’album est dans tous les tops des ventes, l’auteur omniprésent dans les médias et les librairies depuis quelques semaines, mais nous ne pouvions pas faire l’impasse sur ce 4e volume qui marque un tournant décisif dans la vie du jeune Riad.

Difficile d’en dire plus sans tomber dans les spoilers, mais clairement la série monte encore d’un cran. Vous pouvez lire la chronique du premier volume ici pour vous faire une idée : Avec ce livre il n’éclaire pas seulement l’histoire personnelle de son enfance ; il garde une lucidité impitoyable, qui lui permet de sortir de ce regard particulier pour donner un aspect universel à cette histoire. Une porte d’entrée pour faire la lumière sur un contexte plus large, historique et culturel, qui est tant d’actualité en cette période…
Une exposition sur la carrière et le travail de Riad Sattouf est visible à Paris jusqu’en mars 2019. Cette exposition gratuite à la BPI du Centre Pompidou (clin d’œil à l’enfant qui ne savait dessiner que lui) se double d’un catalogue tiré de l’expo Riad Sattouf, L’écriture dessinée. Une occasion de découvrir  la place centrale du reportage & de l’autobiographie et toute l’étendue de son travail.

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#Comics
Batman White Knight deSean Murphy & Matt Hollingsworth, Urban Comics

On l’attendait, le titre a fait beaucoup parler de lui, car cela faisait longtemps qu’une histoire de Batman ne s’était pas un peu écartée des sentiers battus (en restant dans l’esprit.) Sans être un what if, un reboot ou une version alternative, Sean Murphy arrive à renverser les rôles entre Batman et le Joker. Alan Moore et Brian Bolland dans le mythique The Killing Joke avaient déjà immortalisé ce lien fort entre les deux personnages, aussi fous l’un que l’autre en les liant à jamais. Dans Batman White Knight, le dessinateur va plus loin en faisant du Joker le « good guy » alors que Batman ne se maîtrise plus. Il ajoute également un personnage à l’équation, Harley Queen, parfaite comme catalyseur et moteur de l’histoire ( sa meilleure incarnation à ce jour.)
Le ton contemporain et cette approche réaliste du personnage nous tiennent captifs. Son travail sur les héros et la crédibilité de leurs réactions s’accompagne d’une réflexion sur notre époque. Fake news & réseaux sociaux, politique & émeutes… les prises de décisions fortes ou encore les réactions de Batgirl et Nightwing donnent une bonne dose de crédibilité à l’ensemble (même si le titre comporte une dose de fantastique propre à la mythologie Batman, un poil dommage : on aurait aimé que l’auteur joue à fond cette carte du réalisme et oublie les pouvoirs de certains personnages.)
Toute la partie dessin et encrage est de très haut niveau, le dessinateur se fait plaisir sur le titre en multipliant les clins d’œil et des références aux Batman des années 80-90 (les fans de Batmobiles seront comblés) et offre une vision sombre, gothique & esthétique de Gotham. Des scènes d’actions aux designs des costumes et des véhicules, son trait dynamique nous hameçonne et nous emporte dans cet univers revisité. Urban comics a édité une version noir & blanc en plus de la version couleur, mais le travail sur la couleur de Matt Hollingsworth est assez organique : les ambiances, la tonalité et les choix du coloriste mettent en valeur le travail du dessin et donnent des directions que n’offrait pas la version noir & blanc.
Sean Murphy est un très grand dessinateur et illustrateur, son sens du rythme et de la mise en page laisse assez rêveur sur certaines planches et à 38 ans seulement il fait déjà partie des grands illustrateurs qui auront mis en scène le bat-vétéran.

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#Manga
Rien ne fera venir le jour de Yoshihiro Tatsumi, Cornelius

Deuxième volume de cette anthologie Tatsumi après Cette ville te tuera en 2015. Jean-Louis Gauthey a commencé à éditer l’ensemble de ses œuvres après la publication de sa très belle autobiographie Une Vie dans les marges (Lire l’incontournable). Le mangaka fait partie de ces figures tutélaires pour plusieurs générations d’auteurs, tant par son approche intime et réaliste de la société japonaise que par son style graphique. L’un des fondateurs du manga d’auteur, inventeur du Gekiga, une forme nouvelle de fiction ancrée dans le quotidien avec une réflexion sociétale, en réaction aux « story manga » alors en vogue portées par Tezuka (Lire l’incontournable).
Son œuvre marque un moment clef pour l’industrie du manga et si elle est aujourd’hui reconnue, elle a mis un peu de temps à émerger à nouveau. Prévue en 5 volumes (minimum), cette anthologie en plusieurs tomes se veut la plus complète et la plus pointue sur l’auteur et ce deuxième volume confirme la très belle surprise du premier. Le ton sombre contraste avec les dessins lumineux, la violence des situations avec la mise en scène légère. À travers ses dessins, son sens de la mise en scène, il parvient à nous emporter dans cette exploration sans artifice d’histoires qui souvent finissent mal.
L’éditeur propose un rapprochement avec Balzac et sa construction de sa Comédie humaine en préface, que Yoshihiro Tatsumi approuvait malicieusement. Et la lecture de ces nouvelles qui abordent, dans le Japon conservateur des années 60-80, des thématiques fortes comme l’amour débarrassé de la romance, la vie familiale non idéalisée ou thématiques délicates comme l’avortement, la maladie, le suicide, le travail avilissant… Des histoires courtes qui questionnent la morale à travers des personnages attachants et très vivants. L’ensemble est saisissant et puissant, on découvre ou redécouvre l’œuvre d’un des plus grands mangakas qui avait un regard acéré sur son époque. Ce travail de réhabilitation se double d’un travail exceptionnel sur l’objet, entre la mise en valeur des originaux, les scans d’anciennes publications et l’appareil critique.
Un beau boulot qui compense un peu les 4 ans d’attente entre la parution de ces 2 premiers tomes de l’anthologie. Grands lecteurs de manga ou de roman graphiques, amoureux de récits engagés, ne passez pas à côté de l’œuvre de Tatsumi.

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#BD
L’âge d’or T1 de Cyril Pedrosa & Roxanne Moreil, Dupuis

Un royaume en péril, une princesse berserk, un chevalier philosophe, une cité maudite, un livre qui pourrait changer le monde… Je ne sais pas s’il faut en dire plus pour déjà vous donner envie de jeter un œil à cet imposant bouquin. Ah si, feuilletez-le pour tomber sur les doubles planches sublimes, canevas inspirés de tapisseries médiévales, rehaussés de couleurs pop et d’un travail minutieux sur les perspectives. Si le dessinateur a particulièrement travaillé ses personnages aux trognes déformées, les décors merveilleux se posent en contrepoint. Enluminures piquées de caricatures.
Coup de maître, le découpage, les concomitances temporelles et les différentes strates graphiques fonctionnent comme une narration à plusieurs niveaux. À la manière des vitraux ou retables pré-Renaissance, dans L’âge d’or, les auteurs composent leurs planches avec ces différents niveaux de lecture et techniques dont la fonction première était d’être compris par tous. Formes et fond se confondent pour nous faire adhérer avec grâce à cet univers complexe.
Roxanne Moreil et Cyril Pedrosa ont façonné un moyen-âge utopiste, dominé par un trône usurpé en pleine révolte paysanne. Tout le livre se penche sur les rapports de domination, riche et pauvres, hommes et femmes… et derrière la quête de cet « âge d’or » se dévoile une fable politique. Un regard sur la société dont les parallèles avec notre époque font frémir et sourire. Mais l’ouvrage ne se cantonne pas à cet aspect, toutes les pages sont portées par un souffle d’aventure et le rythme ne faiblit pas. Le livre tient aussi bien de l’album que de l’art-book, on peut se perdre avec bonheur plusieurs fois dans un dessin. Le regard est emporté et on en ressort stupéfait après 230 pages qui ne sont que la première moitié du diptyque. Une première partie pleine de promesses où les personnages changent beaucoup, annonce d’une suite sombre et encore plus mouvementée.

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#Comics
Andy, Un conte de faits de Typex, Casterman

Résumer la vie d’Andy Warhol, ses proches & son influence en bande dessinée telle est l’ambition de Typex, artiste néerlandais rompu à l’exercice (il avait déjà brossé le portrait d’un autre génie populaire Rembrandt.) Avec la même méthode, il va découper la vie de l’artiste en chapitres clefs, cherchant à mêler éléments biographiques, citations, fictions & œuvres de l’artiste. Pour Andy, il pousse le vice à réaliser chaque chapitre sous forme d’un comics indépendant, avec un style et une approche différente à chaque fois : le livre se présente comme un recueil imposant (560 pages) de 10 numéros uniques couvrant une partie de sa vie. Cartoon, réalistes, roman noir, soap… chaque style utilisé influe aussi sur la narration et le propos. On a l’impression que plusieurs artistes se sont penchés sur la question avec à chaque fois un point de vue différent sans jamais verser dans l’excès d’informations.
Extrêmement documenté, l’ouvrage se présente comme une biographie du pape du pop art, mais aussi comme un portrait de son époque. Chaque chapitre est introduit par un jeu de cartes recto/verso (portrait/bio) avec les personnages importants de la culture pop qui ont eu un lien avec Warhol : Marilyn Monroe, Jackson Pollock, Truman Capote, Lou Reed, Nico & le Velvet Underground, Bob Dylan, JM Basquiat, Keith Harring, Dali, Michael Jackson… L’ouvrage n’est pas tendre avec Andy, de sa maladie juvénile à la mort de sa mère, de ses premiers émois à sa vie amoureuse difficile en passant par l’attentat qui faillit le tuer, le portrait dressé par Typex mêle la face obscure du personnage et son succès public. Coups de génie, grandes idées et succès sont mis en parallèle avec ses doutes, problèmes et échecs.
Composition des pages, styles de dessins, couleurs, tout est codifié et rend hommage à l’art de Warhol, mais aussi aux grands artistes de cette période ou qui ont inspiré le dandy new-yorkais. Walt Disney, Winsor McCay (Lire l’incontournable), Charles Addams, Guy Peelaert… sont les styles les plus immédiatement identifiables, mais le dessinateur s’amuse de ses compositions et place le dessin au centre de tout (en miroir de l’abandon de celui-ci par Warhol au fil de ses différentes périodes.)
La distance engendrée par les ruptures de style et de ton (à chaque chapitre) empêche de s’attacher au personnage et le remet à chaque fois dans une perspective nouvelle. Le roi du pop art n’est pas à son avantage dans ce volume même si l’ensemble est un hommage certain. Belle biographie qui éclaire les moments connus, qui donne envie de redécouvrir l’œuvre d’Andy & associés. Un objet hors-norme qui a toutes les qualités d’un beau cadeau de Noël.

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#Manga
The Promised Neverland T1 de Kaiu Shirai et Posuka Demizu, Kazé

Surprendre le lecteur et déjouer ses intuitions, tel est le petit jeu instauré par les auteurs dans cette série qui a fait parler d’elle. Sans trop en dévoiler, car les rebondissements donnent tout leur sens au premier tome, le thème un peu éculé de l’orphelinat aux gamins surdoués promis à un brillant avenir malgré cette période difficile est habilement détourné. Les enjeux montent rapidement et nous sommes entraînés dans une histoire riche et complexe assez loin de l’histoire facile qui nous était promise. Lorgnant du côté du récit d’épouvante en conservant l’action et le suspens au premier plan, ce titre mêle plusieurs genres avec astuce.
Si le titre nous fait immédiatement penser aux Aventures d’Alice au pays des merveilles (Alice’s Adventures in Wonderland) de Lewis Carroll, on s’aperçoit bien vite qu’il a plusieurs points communs dans cette fable qui va au-delà du récit jeunesse dont il a l’apparence. Ce qui se cache de l’autre côté du miroir est terrible et les enfants ont l’intuition bien plus vite que nous, que plusieurs choses ne vont pas. Un merveilleux qui oscille en permanence entre l’attirance et le repoussant. Les contes et légendes nous enseignent qu’en matière de croyances, de mystères et de magie, les jeunes sont plus aptes à comprendre et réagir à ces problématiques. Une thèse assez défendue par Neil Gaiman qui en fait l’un des moteurs de bon nombre de ses fictions.
Les auteurs signent avec cette série, un shônen assez différent de ce qu’on peut lire habituellement, mettant en avant une héroïne et s’éloignant des codes graphiques du genre. La dessinatrice s’attelle à son premier titre ado-adulte après avoir travaillé sur des albums jeunesse. Il en ressort un décalage réussi entre la tension scénaristique et cette esthétique faussement kawaii (adjectif japonais qui désigne assez largement tout ce qui est mignon.) Espérons que la suite soit au rendez-vous après ce démarrage plein de promesses.

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#BD
Les Grands espaces de Catherine Meurisse, Dargaud

Catherine Meurisse nous avait subjugués il y a deux ans avec La Légèreté et ce nouveau livre s’inscrit dans la continuité du précédent. Une écriture stimulante oscillant en permanence entre le plaisir érudit et l’humour tendre de l’ancienne caricaturiste de Charlie Hebdo. Se cultiver sera le maître mot pour la jeune narratrice, qui décide que le dessin et la beauté feront partie de sa vie. Se cultiver au contact de la nature pour cette famille de citadins qui opère un retour à la terre.
Se cultiver en découvrant l’art, la littérature ou le dessin au milieu des champs. La poésie est partout dans ces souvenirs de jeunesse portés par le dessin fin et aérien de l’autrice dont on sent tout le plaisir à chaque page. Le récit parle de vocation et de la découverte du dessin : et comme un écho, le livre tout entier est une balade graphique. À chaque publication, Catherine Meurisse prend plaisir à partager : une vocation de passeur, une complicité érudite qu’elle entretient avec ses lecteurs et qui atteint ici son zénith.
Les bobos et néo-ruraux, le tourisme industriel et les nouvelles politiques rurales, tout le monde passe au crible du regard acéré de la dessinatrice. Amusante ou consternante, la campagne française en plein boom des années 80 cache ses secrets, honteux ou merveilleux ; et d’une expérience personnelle, ce livre touche à l’universel. Il nous fait réfléchir sur l’importance de l’enfance, des souvenirs et de notre environnement dans la construction de soi.
Que vous souhaitiez causer Proust, Loti, Montaigne ou Rabelais avec le nain de jardin ou bien faire un tour au festival du Cabécou® ou encore lire l’un des plus beaux livres de la saison, je vous conseille de vous approprier ces Grands espaces.

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#Comics
Sheriff of Babylone de Tom King & Mitch Gerads, Urban Comics

Sheriff of Babylone nous offre un point de vue terrible et crédible sur l’Irak post Saddam Hussein. Et pour cause, le scénariste est un ancien officier de la CIA en poste en Irak. La maîtrise de l’univers proposé, les conditions des personnages ou l’étouffante tension sont tout sauf artificielles. On retrouve partout sa marque de fabrique, un récit centré autour de relations compliquées, un univers « normal » qui doucement bascule. Ici quatre caractères imposants, complexes et très différents qui vont nous donner plusieurs points de vue (deux hommes et deux femmes, américains et irakiens, croyants et désabusés, combattants et pacifistes…) et cet anti-manichéisme sont une des grandes forces du livre. La partie graphique est assurée par Mitch Gerads qui transforme l’essai en pépite par ses choix de cadrages, couleurs et son trait réaliste qui s’autorise des ellipses. Les décors sont fouillés, poussant encore plus cet effet de réalisme.
Polar aux accents étranges où les personnages semblent en transit entre deux réalités manipulées qu’ils ne comprennent plus. Les planches économisent leurs mots pour mieux les mettre en valeur. Asséché, incisif ou répétitif, le discours à une place centrale dans les livres de Tom King et est ici une clef pour cet instantané d’un lieu momentanément hors du monde. Une des pépites de la rentrée pour public averti.

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#Manga
L’homme sans talent de Yoshiharu Tsuge, Atrabile

Réédition d’une œuvre majeure du Gekiga, une école de mangakas impulsée par Tatsumi (voir Rien ne fera venir le jour plus haut) qui remettait le réel et la société japonaise au centre de ses préoccupations du manga. Figure à part, Tsuge a publié très peu malgré le succès de ses œuvres et l’admiration de ses pairs. Si les éditions Cornelius annoncent pour 2019 des anthologies de ses travaux (dans la veine du travail entamé sur Tatsumi), Atrabile retraduit et réédite L’homme sans talent, ce récit conçu comme une fausse autobiographie évoquant la vie d’un dessinateur ne souhaitant plus dessiner de travaux de commande et ne trouvera plus de travail. Il sera avec cette histoire et Séparation, un des fondateurs du « watakushi manga », une veine du manga autobiographique qui en utilise les codes pour de la fiction. Dans cette œuvre, son double erre à la recherche d’un but, d’une idée, essayant de vendre des pierres d’ornement au bord d’une rivière ou transportant des touristes d’une rive à l’autre pour gagner quelques sous. Il s’entête et se laisse porter dans cette quête du rien, se laisse glisser dans la misère devant le mépris de sa femme et l’incompréhension de son fils. Têtu et apathique, ce personnage n’a d’autre talent que de prendre les mauvaises décisions, et refuse catégoriquement de dessiner ce qui serait son salut. Une mise en scène pleine d’humour noir ou pince-sans-rire que Tsuge déroule avec brio autour de personnages fantasques. 
Le dessin en noir & blanc oscille entre dessins de paysages et d’objets très précis et raccourcis narratifs avec ces visages quasi identiques sur tout l’album du personnage principal où les non-représentations de celui de sa femme. Les ombres et les silhouettes s’imposent comme des motifs dans ces planches qui se font parfois illustrations du monologue intérieur avant de repartir sur l’action et l’instant présent. 
On est plus proche de Baudelaire que de Tezuka au sens romantique, dans ce poème graphique où la laideur devient beauté et le ratage passionnant. Un éloge de la fuite, terme important pour cet artiste qui vit encore retiré des médias et de l’industrie des mangas depuis les années 70 malgré la reconnaissance de son œuvre au Japon et à l’international. Le terme de chef-d’œuvre n’est pas usurpé pour ce livre unique, à plusieurs titres.

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#BD
Spirou ou l’espoir malgré tout d’Émile Bravo, Dupuis

Dix ans après Le Journal d’un ingénu, véritable chef d’œuvre de la série Spirou, Émile Bravo revient avec une suite et la même ambition : ne pas prendre les enfants pour des imbéciles en leur parlant de choses importantes. L’Histoire bien sûr, en montrant la Seconde Guerre mondiale et la Shoah vue de Belgique à hauteur d’adolescent et à travers elle, notre époque (des migrants au racisme ordinaire). Écrire pour la jeunesse demande plus d’exigence contrairement aux idées reçues. L’auteur répond aux questions qui l’ont hanté enfant, pourquoi Spirou est-il habillé en groom, pourquoi n’y a-t-il pas de personnages féminins à part Seccotine, quel est cet écureuil qui semble intelligent… et propose une histoire de Spirou avant Spirou. Distingué d’un prix Essentiel à Angoulême et Prix des libraires de bande dessinée, cet album a marqué durablement la série. L’auteur se lance dans une suite, on ne pouvait que se réjouir.
Ce nouvel album (premier d’une tétralogie déjà programmée jusqu’à 2020) démarre à la suite du Journal d’un ingénu quand la Belgique entre en guerre et que Spirou essaie de retrouver Kassandra, son premier amour. Cette jeune fille d’origine polonaise, juive et membre du parti communiste sera le fil rouge de cette nouvelle intrigue qui amènera Spirou et Fantasio loin dans la découverte de la guerre. Un Spirou humaniste, franc et intègre qui vient d’être choisi par l’ONU pour incarner la figure d’ambassadeur des droits de l’homme. L’humour n’est pas non plus absent entre les saillies de Fantasio, les clins d’œil à Hergé et les dialogues pleins d’esprit. Le dessin et les couleurs sont toujours aussi somptueux, dans ce style proche de la ligne claire très élégante, truffé de détails et rehaussé par son utilisation chaleureuse de la couleur.
Selon l’auteur, le scénario et le découpage des quatre albums sont terminés et durant les deux prochaines années, il va dessiner la suite de ce très beau Spirou ou l’espoir malgré tout. Indispensable pour jeunes et moins jeunes, vous avez là une des meilleures idées de cadeaux pour noël (prenons un peu d’avance.)

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#Comics
I kill Giants de Joe Kelly & Ken Niimura, Hi Comics

Certains livres sont inclassables. Comics aux allures de manga, récit initiatique camouflé en album fantastique, ou belle sortie cachée sous l’avalanche de plus gros titres : I kill giants s’est imposé comme une des très belles surprises de cette année. Barbara tue des géants. Elle travaille dur pour mettre en place des pièges, des rondes, maîtriser son marteau destructeur. Barbara affronte des ados. Elle n’est pas plus à l’aise face aux adultes qu’avec ses camarades de classe qui la harcèlent, mais elle se défend avec force, cultive les répliques assassines et s’organise pour mener sa double vie.
Elle qui se dresse contre des titans ne peut rien face à un mal invisible. Un ennemi plus terrifiant et plus courant que les géants qui nécessite une force et un soutien des proches plus grand que les monstres évoqués. Les auteurs s’emparent d’un thème universel pour en faire une fable contemporaine réussie sur la lutte de cette jeune fille et notre besoin de l’Autre. Récit intimiste en noir & blanc croisé avec une saga fantastique très geek, ce livre émouvant et drôle est à mettre entre les mains de tous les lecteurs (adultes), lecteurs de comics ou non.

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#BD
Il faut flinguer Ramirez T1 de Nicolas Petrimaux, Glénat

Succès du début d’année sur les réseaux sociaux, fan-art, déguisements, coups de cœur spontanés, ce polar décalé était partout avant l’été. Très réussi visuellement avec ses chapitrages graphiques, fausses publicités, questionnaires et logos inventés : l’ambiance et l’univers installés par Nicolas Petrimaux offrent au lecteur un vrai dépaysement. Côté scénario on lorgne du côté des longs-métrages des frères Cohen ou de Quentin Tarantino avec cette histoire de tueurs à gages où le l’assassin le plus craint est un employé de bureau muet spécialiste de la réparation d’aspirateur. Violence exagérée, humour noir et explosions dans tous les sens, le dessinateur s’amuse des clichés du genre autour de son héros à l’air constamment étonné. Le tout dans une Amérique fantasmée qui n’existe que et pour ces fictions policières « à gros budget ». Un cartel mexicain retrouve la trace du paisible Ramirez qui devra s’enfuir en croisant la route de deux jeunes femmes en cavale, version contemporaine de Thelma et Louise. Un album tourné vers l’action entrecoupé de flash-back sur le passé de notre mystérieux réparateur.
Les références au cinéma sont nombreuses et l’auteur parle de mise en scène plus que de dessin en ouverture de l’album pour souligner ce découpage très visuel qu’il a conçu comme un story-board très poussé. Un album concept où rien n’est laissé au hasard dans cette ambiance « années 80 ». La série est prévue en 3 actes et après l’accueil chaleureux des lecteurs pour ce premier volume, on espère que l’auteur va s’en donner à cœur joie dans les suites.

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#BD
Ailefroide, altitude 3954 de Jean-Marc Rochette et Olivier Bocquet, Casterman

N’étant pas adepte de la grimpe j’ai mis du temps à me pencher sur cet album somptueux mêlant les souvenirs de jeunesse du dessinateur Jean-Marc Rochette : sa passion naissante pour l’alpinisme et pour l’art. Magistrale erreur, car ce livre est l’un des plus forts de ce début d’année, un époustouflant récit initiatique inspiré de la jeunesse de l’auteur qui résonne encore longtemps une fois la lecture terminée. Avec son approche très picturale du dessin et son travail intense sur le noir, les décors paraissent habités. Chaque lieu avec sa personnalité propre. Jeux de lumières et de hachures qui alternent entre le fourmillement de détails et leur absence pour laisser place aux personnages ou à l’émotion.
Majestueuse & mortelle, accueillante & terrifiante, la Montagne est dépeinte dans ce livre comme dans les tableaux de Chaïm Soutine qui fascinent tant le narrateur. La beauté et la tragédie accompagnent en permanence les jeunes grimpeurs qui enchainent les voies et les ascensions pour étoffer leurs CV de montagnards et espérer un jour passer guide ou inscrire des records dans les mémoires. Une passion qui naîtra d’une rencontre avec la beauté des sommets autant que les sollicitations d’un ami qui l’initiera à la roche. L’adolescent, futur auteur du Transperceneige, dessine déjà et propose des histoires en bande dessinée, mais reste concentré sur l’escalade malgré les réticences familiales ou les drames qui touchent les apprentis alpinistes autour de lui. La BD vécue comme salut car la montagne ne s’apprivoise pas et la chute n’est jamais loin.

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Illustration principale extraite de X-Men Grand Design d’Ed Piskor
©Ed Piskor/Panini Comics/Marvel
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