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Critiques
par Rémi I. - le 4/01/2021
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par Rémi I. - le 4/01/2021

Enfances asiatiques

3 histoires, 3 auteurs, 3 titres singuliers pour 3 vues matures sur l’enfance. Émouvants à leur manière, par leur authenticité, leur onirisme & leur simplicité.

À la rentrée 2021, 3 bandes dessinées non japonaises d’auteurs asiatiques ont retenu notre attention. Dans ces one-shots grand format au sens de lecture occidental et à la forte pagination, les auteurs font montre d’une grande diversité de récit, de traitement et de graphisme. Représentant des enfants, ils abordent leur sujet d’une manière totalement différente, dans leur ton, leur approche et leur propos.
L’Enfant ébranlé de Xiao Tang s’ancre dans la banalité du quotidien et se pare de subtilité pour émouvoir. Bus de nuit de Zuo Ma se détache de la réalité pour flirter avec le monde des rêves dans un voyage vécu à demi-éveillé. Enfin, Jun de Keum Suk Gendry-Kim aborde l’enfance par le handicap d’un petit autiste et de son évolution jusqu’à l’âge adulte.

L’Enfant ébranlé de Xiao Tang, Kana
Sortie septembre 2020

L’Enfant ébranlé de Xiao Tang, Kana
Sortie septembre 2020

Jeune élève modèle, Yang Hao aime jouer au xiangqi (jeu d’échecs chinois), aller à la salle d’arcade… et vit une vie somme toute banale. Son père est parti de la maison depuis longtemps et cette absence lui pèse. Néanmoins, le retour de la figure paternelle ne comblera pas son manque et coïncidera surtout avec son ouverture au monde.

Drame familial, chronique sociale, cette bande dessinée chinoise retranscrit le quotidien d’un enfant de 10 ans dans les années 1990. Miroir de l’apprentissage de la vie, de la découverte de soi, des autres, des apparences trompeuses et des attentes déçues. Chronique à hauteur d’enfant qui sonde la figure fantasmée du père, la fragilité de la structure familiale, le pouvoir libérateur de l’écriture et la perte de naïveté infantile.

Bouleversant de simplicité, de retenue et de réalisme, ce récit tranche de vie a remporté le 12e Prix international du manga organisé par le Ministère des affaires étrangères japonais. On passe par de nombreuses émotions à la lecture de ses 400 pages emplies de poésie du quotidien et de sentiments doux-amers. Autant influencé par le manga que par l’école chinoise, son graphisme sensible rehaussé de lavis lui donne un charme moderne et délicat.

Traduction : Ning An

Bus de nuit de Zuo Ma, Cambourakis
Sortie août 2020

Bus de nuit de Zuo Ma, Cambourakis
Sortie août 2020


Bande dessinée d’auteur, fantasmagorique, à la jonction entre l’imaginaire, le rêve et la réalité, Bus de nuit est de ces lectures qui ne se racontent pas, mais qui se vivent. Paranormal, vie extraterrestre, contemplation… l’énigmatique parsème ce voyage extraordinaire qui n’a pas réellement de fil d’Ariane, si ce n’est une étrange ligne de bus parcourant l’obscurité de la nuit. Zuo Ma emprunte autant au graphisme noir du gekiga (mouvement de mangas adultes créé par Yoshihiro Tatsumi), au talent de conteur d’enfance de Taiyō Matsumoto qu’aux tranches de vie fantastico-oniriques de Shinya Komatsu.

Contes imaginaires, poétiques, histoires courtes d’enfance, d’insectes, les pages de Bus de nuit s’offrent au lecteur de l’émerveillement à l’absurde, de l’inconnu à l’envoûtement. L’ouvrage se compose de planches très ouvragées qui se parent d’une multitude de hachures circonscrivant cette histoire de rencontres improbables et extraordinaires en pleine obscurité.

Laissez-vous entraîner dans ce voyage envoûtant aux portes de la conscience. N’ayez pas peur de vous perdre, vous n’aurez qu’à prendre le bus de nuit pour rentrer chez vous.

Traduction : Alexis Brossollet

Jun de Keum Suk Gendry-Kim, Delcourt
Sortie septembre 2020

Jun de Keum Suk Gendry-Kim, Delcourt

Keum Suk Gendry-Kim est l’une des autrices coréennes les plus connues en France. On lui doit notamment l’intime Le Chant de mon père ou l’historique Mauvaises herbes. Dans ce nouvel ouvrage, elle s’attèle à la biographie du jeune Jun, enfant autiste né en 1990, vu au travers des yeux de sa jeune sœur. Aimante, attentionnée, elle l’aide, le soutien et suit son évolution ainsi que l’implication de ses parents dans sa prise en charge.
Alors que ces derniers pensaient que leur garçon avait juste du retard, le couperet tombe à 30 mois : leur petit est probablement atteint d’autisme. Il est immédiatement pris en charge.

Motricité, orthophonie… sa nouvelle vie n’a plus rien à voir avec celle d’avant… Ses parents tentent en parallèle de trouver un remède miracle, en vain. Néanmoins, s’il ne parle pas, rien n’est perdu. Il arrivera entre autres à apprendre à lire à 7 ans et se découvrira un talent providentiel pour le chant et la musique.


Porté par le regard de sa sœur, l’histoire de ce garçon hors norme nous place en témoin privilégié de son évolution. Intentionnellement naïve, la ligne de l’autrice est frêle, comme son sujet. En émane une histoire sensible sur le handicap, son acceptation et sa prise en charge.

Traduction : Keum Suk Gendry-Kim et Loïc Gendry


Illustration principale : © Zuo Ma, Cambourakis

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