Après la claque que m'avait mise le premier tome d'Iron Fist, je pensais avoir eu ma dose de super-héros pour les mois à venir. Mais force est de constater que Panini Comics et sa redoutable collection 100% ne veut pas me lâcher. Ghost Rider s'est donc permis de giffler la joue que j'avais encore tendue.
Tout comme la série consacrée au héros venu de K'un-Lun, Ghost Rider est un titre en forme de nouveau départ pour son personnage. Oubliez Johnny Blaze et son chopper, et dites bonjour à Robbie Reyes, un jeune lycéen des quartiers chauds de Los Angeles, qui va se retrouver lié à l'esprit de vengeance et à une étrange voiture noire qui ferait sans doute de l'œil à Dominic Toretto.
On doit cette chouette réinterprétation à Felipe Smith, responsable du design des reptiles pour la dernière série animée Tortues Ninja, qui met de côté ce que nous connaissions du Rider pour n'en garder que l'essence, et embrayer sur un nouvel alter-ego. Tout à fait attachant, Robbie est un Peter Parker des quartiers qui doit s'occuper de son frère handicapé et bosser au garage de nuit pour pouvoir toucher les deux bouts. Et forcément, il finit par se retrouver au mauvais endroit, au mauvais moment, celui qui donne l'occasion à un esprit bien enflammé de prendre, en partie, possession de son corps.
Le scénariste a bien compris ce qui fait la saveur du personnage et entend la restituer avec une énergie folle, sans temps morts ni exposition lourde - pendant quelques pages, on ne sait d'ailleurs pas comment le Rider est apparu - dans une version moderne et dépoussiérée du héros au crâne enflammé. Bref, tout le savoir faire de Marvel en terme d'actualisation mis au service des nouveaux ou jeunes lecteurs.
Malgré cette modernisation certaine et un propos social un peu simpliste - il a le mérite d'exister, tout de même - le Rider ne perd ainsi rien de sa superbe, enchaînant, littéralement, les petites frappes cherchant à terroriser les rues de Los Angeles. Et dans sa chasse aux vilains, notre héros va se heurter au docteur Zabo et à sa seconde personnalité, Mister Hyde. Un choix d'antagoniste plutôt surprenant mais qui prend finalement tout son sens dans les écrits de Felipe Smith, qui cherche à faire de la schizophrènie du vilain un reflet du personnage de Robbie, qui partage désormais ses pensées avec un esprit qui se fait appeler Eli, dans un double monologue intérieur bien senti. Dommage, seulement, que les enjeux entre les deux adversaires se résument à une énième histoire de super-drogue, certes pertinente vu le contexte, mais totalement réuccurent du côté des comics mainstream.
Heureusement on se rattrape avec l'interprétation graphique - proprement brillante - de Tradd Moore, que certains d'entre-vous connaissent peut-être pour son travail chez Image, avec Luther Strode, notamment. Ici, l'artiste met son trait, qui n'est pas sans rappeler l'école American Manga, au service du héros et des décors colorés qu'il traverse. A la croisée des chemins entre le graff, la culture urbaine, la bande-dessinée japonaise et l'inventivité des comic books en termes de composition, vous avez le résultat atteint par Tradd Moore, qui fait de cet All-New Ghost Rider un héros semblable à aucun autre. Les planches sont superbes, et font preuve d'une géométrie rare : les formes se mélangent, les couleurs se confondent et l'action, tout en étant absolument folle, reste lisible.
Si Ghost Rider manque un peu d'enjeux originaux, c'est bien le seul reproche que l'on puisse faire à ce premier tome édité par Panini, porté par un scénario et des concepts modernes et sublimés par des dessins absolument dingues. Ce premier tome a même le sublime mérite d'être auto-contenu, ce qui fait de lui un cadeau idéal. A ne pas manquer dans les rayons de votre librairie favorite.