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par Strafeur - le 21/09/2016
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par Strafeur - le 21/09/2016

Japan Expo 2016 : Shonen & Ahmed Agne (Outlaw Players), l'interview

C'est pour une dernière interview réalisée à la Japan Expo dans le cadre de la French Touch que Shonen (BB Project) et l'éditeur/co-fondateur de la maison d'édition Ahmed Agne de Ki-oon ont bien voulu se prêter au jeu des questions pour nous présenter Outlaw Players. Nous avions pu découvrir le premier tome de ce manga français en début d'été, lui qui faisait suite à un impressionnant trailer sur lequel nous revenons en leur compagnie, tandis que le second tome de cette excellente série à la française est disponible chez votre libraire préféré depuis le 8 septembre dernier. 

Shonen et Ahmed Agne, l'interview

Pour commencer, vous avez fait réaliser (Last Exile) un trailer d'annonce pour Outlaw Players par le studio GONZO, pouvez-vous nous raconter ce projet peu commun, surtout pour un manga français ? 

Ahmed Agne : Pour le trailer  j'avais envie de donner une couleur japonaise au projet, comme on a pu le faire avec le tremplin manga qu'on a organisé avec un jury composé de 3 mangakas professionels japonais. L'idée c'est de dire aux lecteurs qui sont un peu défiants du manga français : "Voila, des auteurs que vous aimez ou que vous lisez ont plébiscité cet auteur, donc vous aussi dépassez vos préjugés et donnez lui sa chance." 
Pour Outlaw Players c'était pareil, le côté japonisant c'était le trailer dont on voulait qu'il soit réalisé par un studio japonais. On a donc fait le tour de plusieurs studios de production au Japon, on a fait des demandes de devis, on a échangé pour savoir lequel se positionnait le mieux sur le projet et puis on a traduit l'intégralité du premier tome en japonais pour qu'ils puissent s'imprégner de la série, des personnages .... Après la lecture du premier volume, ils ont commencé à nous faire des retours en storyboards et dans le même temps Shonen à commencer à produire des illustrations couleurs des personnages ou des décors puisqu'à l'époque on était uniquement en noir et blanc, on ne faisait que les planches du manga, on n'avait pas encore commencé à travailler en couleurs. 

Si vous avez traduit le tome 1, je vous invite à le faire parvenir à Hiro Mashima (Fairy Tail) car il nous disait hier qu'il aimerait beaucoup le découvrir.

A : Ah bah voila ! Il (en montrant Shonen) pensait que je l'avais inventé ! On va s'arranger pour lui en faire parvenir un ! (rires) 

Outlaw Players est un projet qui a été initié en 2002 sur la toile avant d'être mis en pause. Après quoi tu as lancé BB Project qui reprenait certains de ces visuels...

Shonen : Oui voila c'est ça, après on a repris contact par intermédiaire de connaissances communes et j'ai simplement soumis le projet. Et justement on m'a proposé de faire une série personnelle et j'avoue qu'Outlaw Players était le seul projet que j'avais en tête. Même si j'avais arrêté le web comic avant, j'avais tout de même continué à développer l'univers car j'avais toujours eu envie de le reprendre de manière plus personnelle. Alors quand on m'a proposé de le publier de manière professionnelle je lui ai dis pourquoi pas, on va tenter notre chance. Du coup j'ai proposé le dossier et le concept avec les croquis, les personnages... et ça a été accepté.

Du coup, est-ce que tu as retravaillé le concept depuis 2002 (date de lancement du web comic) ?

S : Oui je l'ai modifié. En 2002 ça parlait déjà de personnages coincés dans un MMO mais c'était plus simpliste car ce n'était qu'un délire en soit. À la base c'était plus une série pensée comme une succession d'anecdotes sur les jeux vidéo en ligne, plus tournée vers l'humour qui repose sur des mécaniques de MMO.
Là, maintenant qu'on m'a donné l'opportunité d'en faire une véritable histoire, j'ai dû reprendre le projet et réfléchir à une véritable trame ainsi qu'à un concept qui plus cohérents. 

Et tu as donc la fin en tête j'imagine ?

S : Oui j'ai le début, la fin et au milieu j'ai pas mal de thèmes que j'aimerais aborder. Et j'ai déjà une idée du nombre de tomes que ça me prendra.

En tant qu'éditeur, comment porte-t-on un projet comme Outlaw Players ? 

A : Moi ce que je voulais absolument pas faire, c'était le traiter différemment d'un manga japonais parce que c'est un manga français. Je ne voulais pas faire un sous-lancement. On a cette image d'éditeur qui fait des gros lancements pour nos séries japonaises, on allait pas faire moins bien pour un manga français. Au contraire j'ai envie de dire, parce que les obstacles sont plus élevés donc il fallait une mise en avant qui soit à la hauteur parce que je pense que lorsqu'on fait les choses à moitié, le public considère que c'est une demie-oeuvre. Si on met les grands plats, qu'on sort la vaisselle argenté et tout le reste, c'est aussi pour que le public dépasse ces préjugés et qu'il accorde de l'attention au bouquin. Il y a eu le trailer, des extraits en librairie, des campagnes de pub à la télé... il y a pas mal de choses qui ont été faites pour montrer au public que c'est pas un sous manga. 

S : Ça reste de la création.

A : L'autre truc super important, c'est que je considère qu'un des gros handicap du manga français c'est son rythme de parution. Parce qu'on a pas de système à la japonaise avec 6 assistants qui aident à faire 20 pages par semaine et du coup, même quand une série est populaire, on sort un tome et il faut attendre 9 à 10 mois, parfois un an, pour avoir la suite. Malheureusement le public en France n'a pas été habitué à ces rythmes là, il a été mal éduqué avec un tome tous les 2 ou 3 mois et c'est ce que je voulais absolument éviter. Je voulais qu'on puisse faire un lancement à la japonaise aussi bien dans le marketing que dans le rythme de publication. Donc ça  fait un an et demi qu'on bosse sur la série et on a déjà 4 tomes de bouclés, ce qui fait qu'on va pouvoir publier le second tome en septembre (ndlr : le premier est paru en juillet), le troisième en décembre le quatrième en mars, on a déjà un planning trimestriel sur les 6 premiers tomes en gros. Si la série devait ne pas marcher on ne pourra pas dire que c'était la faute du rythme de publication. Ça aussi c'était un élément très fort dans notre lancement. On a pas voulu lancer le tome 1 dès qu'il a été prêt, on a préféré patienter même si ça veut dire sortir beaucoup d'argent en amont et faire un gros effort de trésorerie, mais c'était pour optimiser les chances de la série de bien fonctionner.

Et vous seriez partants pour une série animée si l'opportunité se présentait ? 

A : Moi je serai très content ! Et bien sûr il y a cette intention cachée de faire de ce trailer une carte de visite si la série marche très bien pour démarcher des studios européens ou japonais. Leur montrer la vision de GONZO, ce qu'il est possible de faire avec l'univers d'Outlaw Players et ses personnages.

Il y a donc une volonté d'accrocher le monde de l'animation avant une éventuelle publication au Japon ? 

A : Non non, le manga on a déjà quelques touches avec des éditeurs étrangers. Il faut savoir que les éditeurs japonais sont aussi très intéressés par ce qu'il se passe à l'étranger. Ça fait plusieurs années que la Kodansha et la Shueisha ont leur concours international de manga et nous, le message que nous donne les éditeurs japonais depuis qu'on s'est lancés de manière très importante dans la création, c'est : "À chaque fois que vous faites quelques chose, montrez-le nous parce que ça nous intéresse."
Ils sont bien conscients que le Japon ça fait 70 ans qu'ils font du manga, ils ont raconté plein d'histoires, donc il y a forcément un moment où ça tourne un petit peu en rond et je pense qu'ils sont très conscients du fait que les nouvelles histoires et l'avenir du manga passent aussi par cette génération d'auteurs, pas seulement français mais partout dans le monde, des taiwanais, des américains, des russes... qui ont mangé du manga et de l'animé pendant 20 ou 30 ans, qui ont digéré les codes et qui sont prêts à raconter de nouvelles histoires avec leurs parcours différents de celui d'un auteur japonais.
Évidemment en tant qu'éditeur, on rêve tous de boucler la boucle en publiant un manga au Japon. On l'a déjà fait avec Tetsuya Tsutsui
 surProphecy par le passé et le faire avec un auteur français ce serait encore mieux.

Et en tant qu'auteur ? 

A : Lui il s'en fout en fait ! (rires)

S : C'est assez vrai puisque tout ce qui m'intéresse c'est de pouvoir continuer, de terminer et d'aller au bout de mon histoire. Après que ça soit publié à l'étranger où au Japon, c'est plus dans l'intérêt de l'éditeur.

Quelles ont été tes influences pour la création de l'univers d'Outlaw Players ?

S : Je dirais que c'est assez divers, en général j'essaye de m'influencer de ce qui se passe dans le monde réel mais je dirais que c'est normal puisque ça se veut être un jeu vidéo à la base. Je veux dire, on donne un contexte, un background à un monde qui est virtuel mais il ne faut pas oublier que ça reste un jeu. Même quand vous regarder la conception d'un jeu vidéo, les concept-artists vous le diront clairement d'ailleurs, ça ne sert à rien de créer des objets, des batiments ou une géographie totalement fantasiste parce que même le joueur ne s'y retrouvera pas. C'est pour ça que je veux que le joueur se sente un peu chez lui, en gardant une certaine similitude au niveau de la géographie, de l'architecture ou encore du bestiaire ; une vache reste une vache.

C'est ta première oeuvre en tant que scénariste, comment as-tu abordé ce nouveau challenge ? 

S : C'est dur ! J'ai du changer ma méthode de travail je dois faire un storyboard avec mon script avant de commencer mes planches et de faire l'encrage. Ça me rajoute une étape de travail, comme à la japonaise.

Et ça fait donc 1 an et demi que tu travailles sur la série ?

A : Oui c'est ça.

S : Je dirais même plus 2 ans.

A : Ah oui ? C'est quand ? En mars/avril 2014 je crois.. ça fait donc deux ans (rires).

S : C'est surtout le premier tome qui a pris du temps.

A : Oui forcément c'était là qu'il fallait poser les idées, le background...

S : Il a été terminé en janvier 2015.

A : Mais une fois les bases posées ça a été plus simple.

S : Plus régulier oui ! De toute façon il fallait que je m'impose une nouvelle méthode de travail et j'ai d'ailleurs encore changé aujourd'hui. Avant je faisais mes planches directement, là maintenant je dois passer par un storyboard donc je fais mes crayonnés après je le propose et si c'est validé je peux encrer directement. Mais même l'encrage est différent, c'est plus comme il y a 7 ans quand je débutais !

Merci beaucoup messieurs d'avoir pris le temps de répondre à nos questions ! On vous donne rendez-vous dans le futur sur 9emeArt pour discuter de nouveau d'Outlaw Players !

A & S (en choeur) : A bientôt !

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