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par Elsa - le 16/06/2015
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par Elsa - le 16/06/2015

Au-delà des mers, la critique

Il y a des oeuvres qui se savourent au présent.

Ne pas tout vous dire.

Je crois qu'il est parfois bon de ne pas lire les résumés avant d'ouvrir un livre, d'aller voir un film. En ce qui concerne Au-delà des mers, il me semble que c'est particulièrement le cas. Alors je vous dirai juste que cette bande dessinée nous emmène dans un lieu aussi exotique que le port du Havre. Qu'on y croise des jeunes, des vieux. Et puis Matelot. Et puis Sonia

Que parfois les gens se mettent à parler d'une manière étrange, ou bien à danser dans la rue. Et que si pour le reste de la planète, ce jour est celui de la disparition du doyen de l'humanité (à 149 ans, onze mois, trente jours et une heure pile), aujourd'hui au Havre il est question d'un anniversaire.

La danse de l'air et de l'eau.

Alain Kokor nous invite dans son petit monde. Un monde joyeux, un peu fou, absurde sans doute pour ceux qui veulent que tout soit logique et bien droit. Il y distille des personnages délicieux, et les laissent ensuite se croiser dans une histoire faite de petits riens, où s'entremêlent les grands de ce monde et l'Histoire de l'Humanité. Si tant est que l'on accepte de ne comprendre que par petites touches, et encore, avec une bonne dose de non-dits, de jolis silences qui valent mieux comme ça, Au-delà des mers est un véritable bijou.

L'auteur offre aux lecteurs des dialogues souvent hilarants, parfois très touchants, mêle habilement les deux pour que les larmes aux yeux se mélangent aux sourires. Il est question de vie, de mort, de bonheur, d'amitié, de cochon d'Inde et de cinéma suédois. De nouvelle vie, de fin de cycle. C'est un récit aussi aérien qu'aquatique, loufoque et profondément humain. Bouleversant sans en avoir l'air, avec une simplicité de funambule. Où quand une tragique histoire d'amour prenant place sur des millénaires ne durerait presque que le temps d'une journée.

Graphiquement aussi, Alain Kokor sème une infinie tendresse du bout de son crayon. Il y a ces premières pages muettes et sublimes, au fond de l'eau. Puis le Havre, qui se fait élégante et vibrante, avec une mise en scène pleine de malice, joyeuse, vivante et inventive, un trait plein de délicatesse et de sourires, et une couleur qui, avec subtilité, éclabousse tout de lumière. Le sépia se teinte de bleu flou et de rouge vibrant, pour un résultat à la fois étrange et rassurant. Chaque planche est plus belle, bourdonnante et hypnotisante que la précédente, sublimant une histoire à l'onirisme farfelu. Beau, beau, beau.

Au-delà des mers sera sans doute un peu trop saugrenu pour certains, mais si vous aimez des auteurs comme De Crécy, par exemple, des poètes équilibristes dont l'imagination s'envole avec légèreté, plongez. Ce livre est un petit moment précieux, délicat et joyeux, qui laisse exploser le talent fou d'un auteur sensible. Merci à lui pour le voyage.

Note : de simples bandeaux ne rendant pas du tout compte de la beauté des planches, je vous invite vraiment à feuilleter le livre pour savourer sa magnifique introduction.

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