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par Elsa - le 5/05/2014
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par Elsa - le 5/05/2014

Hilda et le chien noir, la critique

L'adjectif 'joli' exprime, à mon sens, en plus du beau, un mélange de légèreté et de poésie. Et lorsqu'il s'agit de décrire le travail de Luke Pearson, joli est bien le premier adjectif qui me vienne en tête.

Introduire ce nouveau tome d'Hilda autrement qu'à la première personne n'aurait pas eu de sens. Enfin sans doute que si, mais cette série occupe une place toute particulière dans mon cœur, et je lui dois bien quelques entorses à mes propres règlements. Hilda, c'est la série que j'aurais aimé lire enfant, et heureusement, je peux me rattraper à l'âge adulte.

C'est comme si Luke Pearson avait su saisir l'essentiel, avant d'y ajouter quelques pincées de merveilleux. Comme un magicien, ou en tant cas un raconteur d'histoires comme on en croise rarement.

Hilda, et puis les autres.

Commençons par le commencement, et les présentations. Hilda est une petite fille aux cheveux bleus. Au début elle vivait au milieu des forêts et des grands espaces, puis elle a emménagé en ville. Certains vous diraient qu'Hilda a beaucoup d'imagination, mais je crois plutôt qu'elle sait regarder. Elle regarde les feuilles, les cailloux, les nuages, les petits ruisseaux et les couchers de soleil. Et c'est peut-être parce qu'elle regarde bien qu'elle voit aussi toutes ces créatures qui nous sont invisibles. Et la campagne comme les grandes villes sont pleines de géants, d'oiseaux qui parlent, de toutes petites personnes et d'effrayants monstres.

Et non seulement Hilda les voit, mais elle peut leur parler, alors à chaque tome elle part à l'aventure en leur compagnie.

Jusque là, c'est l'éditeur anglais Nobrow qui se chargeait de la publication en VF. Mais alors que Nobrow a arrêté de publier ses titres dans la langue de MolièreCasterman reprend la série, et commence par la nouveauté de l'auteur, Hilda et le Chien noir.

Dans ce quatrième tome (chacun pouvant se lire indépendamment), la petite fille est inscrite par sa mère aux Moineaux, une patrouille de scouts. Elle-même y était allée enfant, et sa fille lui promet d'obtenir encore plus de badges qu'elle ne l'avait fait à l'époque. Mais sa rencontre avec un nisse, un esprit domestique, et la présence d'une bête noire bien mystérieuse, aperçue ici et là, vont quelques peu mouvementer les vacances d'Hilda...

Luke Pearson, incroyable raconteur d'histoires.

Hilda, c'est d'abord un univers, sorti tout droit de l'imagination de Luke Pearson, mais inspiré par les paysages, la culture, et le folklore scandinave. Ce sont des décors simples mais riches de mille petits détails qui font toute sa saveur. Les pages d'Hilda sentent l'herbe, la terre un peu sèche, le soleil froid et puis le vent. Les couleurs sont vives, et pourtant un peu passées, pétillantes et douces.

Le trait est rond, souriant, et plein d'énergie. Rien qu'en les voyant, on s'attache instantanément à Hilda et à sa mère, mais aussi à toutes les créatures plus ou moins farfelues que l'on rencontre. Chacun porte en lui une fragilité touchante, mêlée à beaucoup de bonne humeur communicative. Croyez-moi, si les monstres qui vous hantaient enfant étaient nés sous le crayon de Luke Pearson, vous auriez instantanément voulu qu'ils soient vos amis.

La construction des planches est souvent pleine d'inventivité, et joue un vrai rôle narratif. Les cases se superposent, prennent des formes originales, inattendues, qui créent des atmosphères particulièrement réussie.

Peut-être que certains d'entre vous auront pensé à une certaine petite fille aux cheveux verts, quand j'ai parlé de ceux d'Hilda. Et il est effectivement fort possible que Yotsuba et Hilda soient un peu cousines. Elles partagent en tout cas la même capacité à s'émerveiller d'un rien, la même curiosité, et ce don pour nous faire sourire. Mais Hilda est plus grande, plus sérieuse. C'est une exploratrice, et une aventurière.

Dans chaque tome, la petite fille va devoir aider ses nouveaux amis à résoudre leurs problèmes, en découvrant peu à peu leur monde, et à l'aide de son ingéniosité. Ce sont vraiment des intrigues toutes simples, qui rendent cette série tout public. Pour autant, elles sont racontées avec une délicatesse, une finesse, assez incroyable. Hilda est rempli de jolies choses, de valeurs positives. De l'amitié, de la générosité, le sens du partage. Ça n'a l'air de rien, mais ça fait du bien.

Dans Hilda et le chien noir, l'héroïne est partagée entre sa peur de décevoir sa mère, ravie de partager une expérience avec sa fille à travers les Moineaux, son sens du devoir envers le petit nisse (qui ne lui a rien demandé), et sa curiosité piquée à vif par le mystère de la bête dont tout le monde parle. 

Je crois, en fait, qu'en lisant Hilda, je retrouve l'exacte sensation que j'avais, petite fille, en lisant les livres de Roald Dahl. Cet univers réaliste mais parsemé de touches de farfelu, ces personnages un peu fragiles, mais géniaux et incroyablement attachants, les aventures qui nous emmènent ailleurs, et puis les dialogues, dont je n'ai pas parlé, encore, mais qui font mouche à chaque fois. Même traduites, les tirades des uns et des autres sont souvent des petites merveilles de justesse. Lire un Hilda c'est vraiment, vraiment, retrouver cette magie de l'enfance, quand on plongeait dans un livre, et que plus rien n'existait autour. Chaque tome a un rythme, un ton, un peu différent, mais la magie fonctionne à chaque fois.

Avec Hilda, Luke Pearson a créé une série aussi belle graphiquement que par son contenu. C'est le genre de bande dessinée à offrir aux enfants de votre entourage pour mieux les leur voler. (Mais, en un sens, je vous conseillerais surtout de vous les offrir à vous-même.) Hilda et le Chien Noir, quatrième tome de la série, mais premier à paraitre chez Casterman, est une nouvelle preuve du talent de son auteur, avec une aventure pleine d'humour, de subtilité, et de bonne humeur.

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