Il y a toujours un moment, une année où on sent que l'enfance s'en va inexorablement et que l'âge adulte n'est plus très loin. Une année remplie de nostalgie où on voit le temps filer trop vite, où on aimerait pouvoir continuer à grimper dans les parcs à jeux même si on a plus l'âge, et s'acheter des playmobils plutôt que des fringues avec notre argent de poche. Dans ces moments-là on a bien besoin d'un compagnon de jeu, quelle que soit sa nature...
Rencontre avec un fantôme
C'est plus ou moins l'histoire de L'été Fantôme, qui sort ce mercredi 25 avril chez Glénat. Louison est une gamine un peu grognon : avec sa grande soeur et ses cousines, elle s'apprête à passer l'été chez sa grand-mère. Passer du temps avec ces filles, pour elle c'est toujours une fête. On rigole, on se promène, on joue à des jeux et on fait des blagues... Mais cette année, les choses sont différentes. Sa soeur et ses cousines ont plus la tête aux garçons et à la drague qu'aux châteaux de sable sur la plage.
Alors Louison traîne toute seule. Dans le jardin de la maison, elle fait une drôle de rencontre : une petite fille, d'à peu près son âge, habillée de façon très old school. Cette petite fille, elle l'a déjà vue sur une photo de sa grand-mère, alors que cette dernière était enfant. Il s'agit de Lise (très joli prénom n'est-ce pas), la défunte grande tante de Louison. Et si Lise est morte, elle n'a jamais vraiment eu envie de quitter la terre. D'abord effrayée, Louison décide finalement d'accepter le fantôme comme compagnon de jeu, puisque sa soeur et ses cousines ont autre chose à faire.
Une histoire surprenante
On ne va pas se mentir, se retrouver face à un fantôme, c'est flippant. Surtout que Lise n'est pas toujours bienveillante : petite fille piégée à jamais dans une maison, elle tue le temps en faisant des frayeurs à ses occupants. En Louison, elle voit une camarade de jeux avec qui elle va enfin pouvoir s'amuser comme quand elle était enfant avec sa petite soeur. Dans un premier temps, c'est surprenant de voir du fantastique s'immiscer dans cette histoire très réelle. Surtout que ce fantôme a tout un tas de pouvoirs : transférer sa conscience à l'intérieur d'un animal, devenir matérielle, se glisser dans les miroirs... Avec elle tout devient possible et ce n'est pas un effet de l'imagination de notre héroïne, puisqu'elle s'amuse parfois à effrayer d'autres habitantes de la maison.
Si ce fantôme n'est pas une métaphore, l'autrice Elizabeth Holleville se sert de ce personnage pour matérialiser la peur de grandir de Louison. Alors que sa soeur et ses cousines sont devenues trop grandes pour jouer avec elle, elle rencontre une petite fille qui sera petite pour toujours. Ce constat lui fait peur et la réconforte à la fois. Si elle est bien consciente qu'elle ne peut pas rester enfant pour toujours, le personnage de Lise rend la mort un peu... tentante.
On sent que L'été Fantôme est écrit et dessiné par une femme. L'histoire ne comporte que des personnages féminins, tous plutôt bien écrits, comme si Elizabeth Holleville y transférait ses propres souvenirs. La grand-mère qui perd peu à peu la mémoire, l'adolescente secrètement amoureuse de sa cousine, la gamine qui a peur de grandir... Le temps d'un été, les esprits torturés font face à leurs propres questionnements.
L'été Fantôme est une BD à lire au soleil avec une bonne boisson fraîche. Le dessin tout en courbes et les jeux d'ombres et de lumières matérialisent bien l'ambiance feutrée des longues journées d'aout. Pourtant, on ne peut pas s'empêcher de frissonner en voyant le personnage de Lise le fantôme... L'album est à retrouver dès mercredi chez Glénat au prix de 25 euros.