Connu pour ses films adaptés des romans Hunger Games Francis Lawrence embauche Jason Momoa, lui aussi connu pour ses rôles dans des adaptations de comics (Aquaman, Justice League) et de roman (Game of Thrones), bon jusque là on est sur du professionnel de l’adaptation. Mais Slumberland ne se présente pas comme une adaptation au sens habituel mais plutôt comme « inspiré de » à la Disney (on va y revenir plus bas).
Et surtout, Winsor McCay est l’un des précurseurs du dessin animé, il a déjà animé ses personnages en 1911 dans un mélange de prise de vues réelles et d’animation qui auraient pu être une excellente porte d’entrée pour d’adaptation, dans la lignée des films Mary Poppins (1964) et Qui veut la peau de Roger Rabbit (1988) pour citer les plus marquants.
McCay est l’un des artistes les plus innovants du médium, il comprend et adapte son propos aux planches quand il crée sa bande dessinée et il adapte sa technique pour ses dessins animés : Gertie the Dinosaur ou dans son film humoristique sur la création d’un dessin animé. Aussi, on aurait aimé un réalisateur qui prenne cela en considération, en place d’avoir seulement gardé un bout de l’histoire et l’univers onirique.
La bande dessinée sans droit d’auteur, un conte de fées ?
Au même titre que Disney a fondé son empire cinématographique sur l’adaptation de contes populaires, des contes de Grimm à ceux d’Andersen en passant par Charles Perrault, aux auteurs de contes modernes Carlo Collodi, Lewis Carroll, J.M. Barrie, Rudyard Kipling… Netflix, et d’autres, commencent à piocher dans le patrimoine de la bande dessinée.
Il existe tout un pan de la production dédiée aux adaptations de bande dessinée, des séries Marvel aux séries indés comme Locke & Key et Umbrella Academy mais avec Slumberland, c’est un nouveau pas : car l’histoire n’est plus une adaptation mais seulement inspirée de cet univers, de son histoire et son esthétique.
A la manière d’un Alice au pays des merveilles de Disney qui travaille l’imaginaire de Lewis Carroll sans coller au texte, le réalisateur Francis Lawrence va retravailler la matière de Winsor McCay pour en faire autre chose (plus ou moins bien, on ne pourra juger qu’en 2022). Mais Netflix a trouvé un début de filon, car on rappelle que l’œuvre de Winsor McCay est tombée dans le domaine public. Donc pas d’argent à dépenser pour un univers très riche et déjà travaillé sur lequel s’appuyer, ni d’ayants droit pour négocier. On ne s’embarrasse plus de coller à la matière d’origine, peu importe si les fans sont déçus ou les critiques puisqu’il s’agit d’autre chose…
No, you’re not dreaming—that’s Jason Momoa with a full set of horns.
— NetflixFilm (@NetflixFilm) April 6, 2021
Here’s a sneak peek behind the scenes at SLUMBERLAND, a new adventure story about an eccentric outlaw (Momoa) who guides a young hero (Marlow Barkley) through a secret dreamworld.
Coming to Netflix in 2022. pic.twitter.com/QZIaQbk7HM
Ici Jason Momoa incarne Flip, devenant un avatar plus proche du dieu Pan ou de la figure du satyre que du Flip rondouillard et roublard de la bande dessinée ; et sera le guide étrange de la jeune Nema (Marlow Barkley) qui incarnera la nouvelle dormeuse ingénue, qui découvre le royaume de Slumberland.
De la quête intemporelle & philosophique de Nemo aux pays « des rêves » (lire notre coup de cœur ici), Netflix semble en retenir qu’un probable Narnia-bis en résumant : « une nouvelle histoire d’aventure sur un hors-la-loi excentrique qui guide une jeune héroïne à travers un monde de rêve secret. »
Bon dommage pour ce rendez-vous déjà manqué, le titre a tellement inspiré la bande dessinée contemporaine qu’il mériterait qu’un réalisateur s’y attaque avec une vraie vision.
Illustration principale : ©Netflix