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par Elsa - le 22/01/2016
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par Elsa - le 22/01/2016

Le joueur d'Échecs, la critique

L'éditeur Sarbacane continue mois après mois d'enrichir son catalogue de bandes dessinées sensibles et riches, dont Le joueur d'Échecs de Thomas Humeau paru à l'automne dernier.

Partie en huis clos.

Emma a presque toujours vécu sur le paquebot dont son père est le capitaine. Elle loge dans la chambre qui appartenait à sa mère avec sa chouette apprivoisée, Solange. Mais voilà qu'un matin, le grand champion d'échec Mirko Czentovic monte à bord, et tout le monde est aux petits soins pour lui.

Tellement aux petits soins qu'on lui propose même la chambre qu'occupait jusque là Emma pour la durée de son séjour ! Furieuse, la jeune femme se venge en proposant au prestigieux passager un défi d'apparence ridicule, au grand dam de son père : une partie d'échec. Si Emma gagne, elle récupèrera sa chambre, si elle perd, elle accèptera de passer un moment en sa compagnie. Ce duel semble perdu d'avance, jusqu'à ce qu'un mystérieux passager intervienne...

Destins croisés.

Cette bande dessinée est librement inspirée du roman de Stefan Zweig. C'est un récit en abyme : les dialogues qui ont lieu sur le paquebot ouvrent deux autres récits : d'un côté nous allons suivre la carrière de Mirko Czentovic jusqu'à ce qu'il devienne le champion que l'on connait, de l'autre nous découvrirons les secrets de Mr B., qu'il confie peu à peu à Emma, avec qui il se lit d'amitié.

La construction du récit est très réussie, passant habilement du huis clos du paquebot aux chemins de vie des deux hommes. On rencontre les personnages avant de découvrir ce qu'ils dissimulent. D'abord détestable, car bouffi d'orgueil, Mirko Czentovic gagne en densité alors que l'on apprend ses faiblesses, et les difficultés qu'il a traversé jusqu''ici. Mr B., lui, revient de très loin, et finira par avouer à sa nouvelle amie les secrets de son talent de joueur. C'est une histoire riche et bien menée, revenant aux origines de deux hommes singuliers se croisant le temps d'une partie. 

Cependant, Le joueur d'Échecs est assez dense. C'est là le problème de beaucoup d'adaptations de roman en bande dessinée, où l'on ne peut se passer du texte pour expliquer les subtilités de l'histoire, prendre le temps de développer les personnages et les évènements en profondeur. En bande dessinée, cette quantité de texte occupe tant de place qu'il n'en reste pas assez pour l'émotion. Le joueur d'Échecs se lit avec beaucoup d'interêt, mais manque peut-être un peu d'intensité.

Graphiquement, le trait de Thomas Humeau est intéressant. Vibrant, sensible et élégant à la fois, il nous entraine dans une ambiance qui lui est propre. Sa mise en page passe d'une narration graphique assez classique à des pages beaucoup plus originales et surprenantes et servent parfaitement le propos et les moments clés du récit. Ses plans sont souvent originaux, très vivants, et on sent chez l'auteur un regard très juste et riche sur ce qui l'entoure, sur les gens et les choses. La gestuelle des personnages, ainsi que leurs expressions sont très réussis.

Cette adaptation libre de Le joueur d'Échecq manque un peu d'émotion, mais c'est une bande dessinée riche, forte de personnages complexes et d'une mise en scène très plaisante.

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