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par Elsa - le 10/08/2016
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par Elsa - le 10/08/2016

Rêve d'Olympe, la critique

Ces jours-ci, l'actualité parle beaucoup, à juste titre, de Yusra Mardini, jeune femme d'origine syrienne qui a nagé trois heures durant pour faire accoster le bateau qu'elle et une vingtaine d'autres réfugiés avaient emprunté pour fuir leur pays. Ce qu'on oublie peut-être, c'est que chaque membre de l'équipe olympique des réfugiés compte son lot de drames et a pris tous les risques dans l'espoir d'une vie meilleur. Dans l'espoir aussi de pouvoir pratiquer sa passion dans de bonnes conditions. Samia Yusuf Omar avait un rêve. Elle aurait dû faire partie de cette équipe aux JO de Londres en 2012...

Un rêve.

Samia Yusuf Omar était somalienne. Elle a concouru dans l'épreuve du 200 mètres femmes aux Jeux Olympiques de Pékin. La vie dans son pays controlé par les islamistes, où une femme n'a pas le droit de faire du sport, ne lui permettait plus de s'entrainer correctement. Désespérée, elle tenta de rejoindre l'Europe pour réaliser son rêve : participer aux JO de Londres en 2012. Elle mourut noyée en Méditerrannée, pendant sa traversée.

Touché par son destin, Reinhard Kleist a choisi de reconstituer son parcours et de rendre hommage à une jeune femme forte et courageuse.

Un hommage nécessaire et émouvant.

Avec l'aide et le soutien de la journaliste Teresa Krug et de la soeur de Samia, Hodan Yusuf Omar, l'auteur nous raconte le quotidien de la jeune sportive. Sa vie de famille, la passion qui l'anime et les difficultés qu'elle devait à chaque instant surpasser pour pouvoir courir. Puis la décision de partir et la mise en oeuvre de ce projet. Les passeurs, la violence de chaque instant, les épreuves qu'elle traverse les unes après les autres. 

Cette bande dessinée dresse le portrait d'une jeune femme déterminée et touchante. Il donne vie à un nom qui occupa quelques jours l'actualité au moment de l'annonce de son décès. D'anonyme au destin dramatique elle devient héroïne et on ne peut que saluer le travail de Reinhard Kleist, qui allie des recherches minutieuse à un grand talent de conteur, pour lui rendre cet  hommage. À travers cette histoire, ce destin, il confronte aussi le lecteur à la réalité du parcours de chaque migrant qui choisit un jour d'abandonner tous ceux qu'il aime et tout ce qu'il possède parce qu'il n'avait plus d'autre choix. Un parcours personnel et pourtant universel, particulièrement nécessaire dans une période où les discours haineux semblent par moment prédominer.

Le récit est entrecoupé de messages facebook laissés par Samia Yusuf Omar au fil de son parcours. Comme tous ses messages ont été supprimés avant que l'auteur ne commence à travailler sur ce projet, seul l'un d'eux est authentique. Mais si les autres textes sont fictionnels, la jeune femme avait réellement l'habitude de donner de ses nouvelles par ce biais. Ce format a ses avantages et ses inconvénients. D'un côté, il est réaliste, vivant. Il donne à l'auteur la possibilité de conserver une forme de pudeur en laissant son héroïne être la narratrice de son parcours. De l'autre, cette incursion du numérique dans l'histoire peut être un peu déstabilisante. Cela amène un côté un peu froid, une distance qui peut par moment atténuer l'émotion.

Le dessin est délicat et vibrant. Il en émane un mélange de douceur et d'énergie qui sied à merveille à son héroïne. À chaque instant, Samia Yusuf Omar conserve son espoir et son optimisme, guidée par son rêve. Elle occupe les planches de sa présence émouvante et puissante, mais l'auteur attache aussi beaucoup d'importance à retranscrire son environnement, nous immergeant véritablement dans son périple difficile et sombre.

Rêve d'Olympe est un hommage très touchant à une athlète au destin tragique. L'histoire d'un rêve mais aussi celle d'une réalité  qui nous concerne tous.

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