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par Luxia - le 19/12/2013
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par Luxia - le 19/12/2013

[VOF] La Voie de la Colère - A.Rouaud

Toujours de la fantasy pour ce livre, et toujours du français. Mais avec davantage d’action, davantage de sentiments, et davantage de combats à l’épée. Messieurs dames, saluez pour La Voie de la Colère !

 

Œuvre

Titre : La Voie de la Colère

Cycle : Le Livre et l’Épée – Tome 1

Auteur : Antoine Rouaud

Première publication : 2013

 

Synopsis personnel

An 10 de la République. L’ancien général d’empire Dun-Cadal n’est plus qu’une épave brisée qui se noie dans l’alcool. Pour oublier qu’on l’a trahi, qu’il a failli à un empire désormais tombé, qu’il a failli à son empereur, et pire que tout, qu’il a failli à la seule personne qu’il ait jamais considéré comme un fils.

Et alors qu’une jeune historienne vient le trouver pour lui faire raconter son histoire et celle de ce jeune homme qui lui a sauvé la vie et dont il a fait le meilleur chevalier de l’Empire... Passé et présent vont se rencontrer sous la forme mouvante d’un assassin qui exécute sans remords les élus de la République, faisant remonter à la surface les vieilles haines et ressurgir la voie de la colère...

               

Un extrait pour se mettre dans le bain ?

Ce fut le tournant de la bataille. La nouvelle de la chute du dragon rouge se propagea telle une trainée de poudre. Les hommes de Stromdag battirent en retraite sans demander leur reste. Il n’y eut bientôt plus rien que les crépitements de flammes continuant de se repaitre des carcasses, les soupirs des survivants, les râles des mourants. Il eut beau parcourir la forêt du regard, Dun-Cadal ne trouva trace de son élève. Il vérifia chaque corps à terre, chaque visage tuméfié, brulé, soulevant ce qui restait des cadavres avec rage. Mais il n’y avait pas de Grenouille.

– Dun-Cadal, dit Négus dans son dos.

Ce n’était pas ce corps-là, ni celui-ci... Il ne restait plus que les soldats calcinés près du piège déchiré par le dragon rouge.

– Dun-Cadal ! réitéra Négus avec force.

Il l’attrapa par l’épaule et le contraignit à se redresser.

– Il est là, annonça-t-il.

Dans la nuit claire, à la lumière vacillante des flammes, il avançait en boitant, la capuche rabattue sur la tête, un filet de sang au coin des lèvres. Et, sous son bras, une corne...

Tu n’es pas prêt.

Je peux le faire !

... qu’il jeta aux pieds de son mentor avant de s’écrouler à genoux.

– Je crois... je crois que nous avons gagné, balbutia-t-il.

Aux côtés de Dun-Cadal, Négus restait bouché bée. Le gamin venait de maitriser le Souffle comme jamais personne auparavant.

Je serai le plus grand chevalier...

 

Impression générale

D’accord, Bragelonne, d’accord ! Vous aviez raison de vendre ce roman comme vous l’avez fait ! D’accord, je bats en retraite, ce livre est un excellent roman. Vraiment.

La Voie de la Colère – cette voie que le chevalier se doit de ne jamais suivre s’il veut reste digne de sa charge – est un livre de sensations et de sentiments. La relation père-fils entre Dun-Cadal et son jeune protégé, la perte de Grenouille et la chute de l’Empire, la déchéance et la vie brisée d’un général trop militaire pour avoir su s’adapter aux intrigues de la cour... La vengeance, la colère, la tristesse, la fierté, la haine, l’amour... La Voie de la Colère prend aux tripes, et fait mal au cœur.

Et puis, ce roman est aussi une magnifique démonstration de l’art des faux-semblants... Et ceux de l’intrigue sont très bien rendus par ceux du style, comme pour mieux perdre le lecteur dans les méandres des complots, et le faire douter de ce qu’il lit et de ce qu’il doit croire...

 

Ce que j’ai aimé

La caractérisation des deux personnages principaux que sont Dun-Cadal et Grenouille. Et encore plus que leurs caractères respectifs, leur relation. C’est juste... très bien rendu, totalement cohérent et très émouvant. J’en aurais presque pleuré, si c’est pas honteux...

La richesse du récit. Alors qu’on se pense parti pour un roman de quête ou de relation maitre-apprenti comme il en existe tant... Eh bien non. Les choses sont bien, bien, bieeeeen plus complexes que cela. Et le pattern d’écriture choisi par l’auteur, qui va éclairer la même histoire sous deux angles différents, est très efficace. Antoine Rouaud, ou comment manipuler son lecteur. C’est juste du grand art.

Tiens, pour rester dans l’écriture... J’ai beaucoup apprécié la manière dont les passages passés/présents se mélangent, l’un faisant irruption dans l’autre au détour d’un paragraphe, retransmettant très bien la manière dont on peut se souvenir d’une chose ou d’une autre en réponse à un stimulus donné...

Le Souffle, cette sorte de magie qui n’est rien d’autre qu’une sorte d’harmonie avec le monde, la vie, et la respiration de tout ce qui est vivant. Pas de grands effets de manches ni de boules de feu, juste le calme et la sérénité d’un ordre naturel qui soutient celui qui a sur le dompter.

 

Ce que je n’ai pas (ou moins) aimé

Les personnages féminins trop effacés. Oh, certes, elles ont leur importance et l’histoire n’en serait pas là sans elles... Mais pouvoir leur donner un peu plus de consistance quand j’essaye de me les représenter aurait été un plus.

Le manque de consistance du monde. La Voie de la Colère est tellement focalisé sur les personnages et leurs interactions que le monde dans lequel ils agissent semble par comparaison terne et mal défini, sans existence réelle.

Le fait qu’il y ait une suite, aussi paradoxal que cela puisse paraitre. La Voie de la Colère peut très bien se lire en temps que volume indépendant. Et je dois dire que j’appréhende un peu la manière dont l’auteur va pouvoir gérer les deux tomes suivants, puisqu’il ne pourra plus user des mêmes artifices... J’aurais presque préféré qu’il s’agisse d’une histoire en un tome. Mais j’espère fortement que la suite me donnera tort...

 

Donc, au final, quel verdict ?

On lit ! On lit ! Ne serait-ce que parce que ce livre est l’illustration parfaite des termes tromperies et faux-semblants... Et puis aussi parce que la relation Dun-Cadal/Grenouille est magnifiquement bien rendue.

La Voie de la Colère ne compte pas encore au nombre de mes coups de cœur inconditionnels –  j’attends notamment de voir les tomes suivants – mais il s’agit néanmoins d’un très bon roman.

 

Mais encore ?

Ce roman a fait l’objet d’un plan communication assez hallucinant de la part de son éditeur : annoncé il y a déjà deux ou trois ans, traduit directement en anglais pour une sortie simultanée en France et à l’international... Bragelonne a certes habitué ses lecteurs à ses plans comm' autour de ses coups de cœur, mais là c’était clairement le niveau au-dessus... Et je suis assez d’accord avec eux, ce roman est vraiment bon.

Sinon, quand il n’écrit pas de fantasy, Antoine Rouaud donne dans le space-opera en saga MP3, et nous livre le très bon Eden... [Pour écouter, c’est par ici]. Talentueux, le monsieur...

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