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par Manu - le 18/04/2014
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par Manu - le 18/04/2014

Locke & Key tome 6 : Alpha & Omega, la critique

Oserez-vous passer de l'autre côté ? C'est la question que nous pose Milady Graphics en ce 18 avril, alors que l'ultime tome de Locke & Key sort en librairie. C'est la fin d'une aventure merveilleusement horrifique qui arrive entre nos mains, et comme toutes les fins, elle amène un pincement au cœur. La question trouve donc ici un double sens puisque, comme souvent lors des fins de très grandes séries, je me suis retrouvé face à un dilemme.

C'est un problème que j'ai avec mes séries cultes : la peur d'arriver à la fin, de ne plus en avoir derrière, de tirer un trait final sur des années d'histoires. La peur d'être déçu parfois. Cela se concrétise de deux manières dans mon cas : soit je suis incapable de finir pendant une longue période (j'ai eu le dernier tome de 100 Bullets pendant un an dans ma bibliothèque avant d'oser l'ouvrir, et j'ai attendu 2 ans avant de regarder la dernière saison de Spooks !). Soit je me jette sur l'œuvre en question dès sa parution, et je n'en ressort qu'à la fin, une fois contenté. C'est le second cas qui s'est présenté avec Breaking Bad par exemple, et aujourd'hui avec Locke & Key. La peur d'être déçu ? Cela fait bien longtemps que Joe Hill et Gabriel Rodriguez m'ont enlevés tout doute sur le sujet.

Beaucoup de réponses ont été données dans le tome 5 de la série. On y découvrait l'origine des clés, de Dodge, l'histoire de Keyhouse et de ses habitants. Suffisamment de réponses ont été données pour éviter une future déception des lecteurs, ce qu'on pourrait appeler "l'effet Lost". Mais l'histoire n'est pas pour autant terminée, Dodge a un plan final à mettre en place et personne ne se doute de sa position actuelle. Ce tome 6, d'à peu près 200 pages (pour 7 numéros inclus), s'attarde donc à faire filer tranquillement la fin de son histoire, avant de boucler toutes ses intrigues, aussi secondaires soient-elles. Aucun personnage n'est laissé pour compte, et ça fait plaisir à voir, même si certains héros sont forcément plus mis en avant. Le dernier chapitre de la série est d'ailleurs magnifique pour boucler la boucle ouverte il y a déjà quelques années.

Difficile de vous dire ce qui est bon ou non sans vous  spoiler quoi que ce soit, particulièrement sur une fin de série. Mon ressenti en lisant ce tome est un grand sentiment de satisfaction. Je n'ai jamais trop voulu cherché moi-même à savoir où allait mener la série, comment elle se termin(ait exactement. Je me suis toujours laissé porter par l'histoire de Joe Hill. Y compris dans la publication, Locke & Key est une série que j'ai toujours apprécié en VF chez Milady, sans trop me soucier de la publication VO (on lit cette fin à peine quelques mois après les américains). C'est l'une des rares séries que l'Internet ne cherche pas à nous spoiler. Ceux qui la lisent savent et se respectent assez les uns les autres pour ne pas aller se gâcher tel ou tel élément. Ce dernier tome se lit, se regarde, et se lit à un rythme changeant. Un début qui prend son temps, ne se presse pas vers sa résolution, tout en soulevant l'épée de la fatale fin qui commence à pointer son nez. Un milieu où les choses prennent vie, s'accélèrent pour aller à la conclusion d'années de publication et de décennies d'histoire. Et une fin où on reprend le temps de poser des cases silencieuses, simplistes et pourtant pleines de sens, d'émotion. Des cases qui font écho aux premières heures de la série tout en ayant pris du bagage depuis, et un sacré bagage.

Certains chercheront forcément à comparer Joe Hill à son père, Stephen King. Il a pris le chemin de l'horreur, et on pourrait lui reprocher si on voulait chercher la petite bête, mais Locke & Key nous prouve qu'en plus d'avoir choisi sa propre identité d'auteur, il a créé son propre univers. Il a pleinement gagné le droit de ne pas lui être comparé. Et on peut même aller jusqu'à voir l'histoire qu'il met en place entre Tyler et son père, au fil des tomes, comme son propre exorcisme d'une situation finalement pas si conflictuelle.

Une nouvelle fois, la seule ombre au tableau de ce tome est son prix. Un peu plus de 24€ pour sept chapitres, et aucun bonus malgré une très belle édition. On aurait aimé voir un peu plus de travail (qui n'était pas forcément là en VO, on vous l'accorde) de recompilation des histoires des clés vues dans les autres tomes, ou une frise chronologique des événements importants. Ce dernier point aurait d'ailleurs été intéressant à voir en début de chaque tome après le premier. On se consolera en se disant que la publication de la série a failli s'arrêter en France, ou au moins changé de main, et que des passionnés se sont battus pour nous fournir la fin.

On dit souvent que le voyage est plus important que la destination. Pour Locke & Key, ils ne font qu'un. L'horreur, l'espoir, la vie, la mort, l'amour, l'amitié et la haine : tout se mélange dans une histoire si naturelle, et pourtant fantastique, qu'on a juste l'impression d'avoir assisté à une tranche de vie dans une famille et une ville finalement pas si différentes de celles qu'on connait. La série en devient presque inclassable, à cela près qu'on pourra la ranger au côté des plus grandes.

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Scène post-générique

Pour finir, et parce que je ne pouvais pas revenir dessus, je souhaiterais adresser un grand merci à César Bastos de Milady. Certains d'entre vous le connaissent déjà, et savent donc sans que j'ai besoin de le dire, que César fait partie des personnes les plus passionnées et les plus gentilles du milieu de l'édition. Mais en plus d'être un fan de Buffy, Firefly et autres whedoneries, et donc d'être quelqu'un de bien, il s'est battu avec certains collègues (qu'on remercie également fortement) pour le maintien de la série chez Milady Graphics alors que le label était en très mauvaise posture. On a vu quelques séries s'arrêter, quelques séries changer d'éditeur, mais ils se sont battus pour conserver les séries qu'ils trouvaient de qualité et qui méritaient d'être défendues envers et contre tous.

Le monde de l'édition est souvent sujet aux critiques les plus faciles, pas forcément injustifiées, mais comme dans beaucoup de cas les bons côtés ne sont pas toujours remis en avant. Mais tant qu'il restera des gens passionnés capables de défendre les séries qui le méritent face aux logiques (implacables) de l'argent, de nous amener des comics et des romans spécialement pour les fans, alors on pourra se dire que l'espoir est toujours présent.

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