17-21 ? 22-26 ? Non, Tatsuki Fujimoto ne joue pas au loto, par contre on est sûr qu’il a gagné le gros lot ! Adepte des titres impactants, émotionnellement et graphiquement, le mangaka n’a beau avoir que 11 ans de carrière, il est assez clair qu’il fait partie des auteurs les plus talentueux de sa génération. Pour continuer dans la numérologie, 2011 a été un tournant majeur dans la vie de Tatsuki Fujimoto. Tout d’abord parce que la triple catastrophe du Tohoku chamboule sa vie comme celle de millions de japonais, mais plus encore, parce que cela remet totalement en question son engagement artistique. Est-ce que dans ce monde faire de l’art a du sens ? Peut-on continuer à créer des bandes dessinées alors que de telles choses se passent à quelques kilomètres de chez nous ? Tiraillé par la vacuité de son existence, il souhaite aider au déblaiement des zones sinistrées et se rend sur les lieux ravagés par le tsunami.
2011 marque également son entrée à l’université d’art et de design du Tohoku, section peinture à l’huile. Cependant, les évènements survenus juste avant les débuts des cours contraignent l’établissement à repousser sa rentrée. Comme ses camarades étudiants, Tatsuki Fujimoto est désœuvré. Il met ce temps à profit, publie ses histoires en amateur sur internet et participe à un concours de jeunes talents de l’éditeur Shueisha. Son one-shot Deux poules au fond du jardin interpelle le jury, qui lui délivre alors un prix. À partir de ce moment-là, Shihei Lin, jeune éditeur de la maison d’édition, prend Fujimoto sous son aile. À seulement 17 ans, sa carrière est officiellement lancée.
Les deux recueils publiés coup sur coup 17-21 & 22-26 reprennent la totalité de ses histoires courtes publiées chez Shueisha entre ses 17 et 21, puis entre ses 22 et 26 ans. Occasion de retracer les recherches, tentatives et évolutions scénaristiques, thématiques et graphiques, ces deux livres révèlent une grande richesse et cohérence pour quiconque a déjà lu les livres de l’auteur. Il est d’ailleurs étonnant d’observer à quel point, dès la première histoire, nombre de ses obsessions ressortent. Absurde, monstres humanoïdes à cornes, antihéros, brutalité et humanité menacée sont déjà là. L’élève Sasako a arrêté une balle dévoile déjà sa fascination pour les femmes. Les pupilles des yeux de certains personnages se customisent et un premier bon graphique est palpable. Dans La prophétie de Nayuta on retrouve la fatalité et la force évocatrices que l’on retrouve dans Fire Punch et de Chainsaw man. L’ainée de ma cadette préfigure l’intimisme et le récit autofictionnel Look back… Autant vous dire qu’après avoir lu ces deux ouvrages, vous n’aurez qu’une envie : replonger dans ses œuvres plus récentes !
17-21 & 22-26 de Tatsuki Fujimoto, Kazé
Sortie mai (17-21) et juin (22-26) 2022
Illustration principale : TATSUKI FUJIMOTO TANPENSHU 17-21 © 2021 by Tatsuki Fujimoto/SHUEISHA Inc. TATSUKI FUJIMOTO TANPENSHU 22-26 © 2021 by Tatsuki Fujimoto/SHUEISHA Inc.
Traduction : Sébastien Ludmann
