Quelques jours après la disparition d'Umberto Eco, c'est une bande-dessinée qui pourrait presque sortir de sa bibliographie qui fait son apparition dans le catalogue de Dargaud, Arthus Trivium, écrite par Raule (auteur de Jazz Mayard) et dessinée par Juan Luis Landa. Un album qui nous plonge dans la France du XVIe siècle et nous présente l'une de ses figures mythiques, Michael de Nostredame, plus connu sous le nom de Nostradamus.
Par la simple utilisation de cette figure controversée, Arthus Trivium s'assure une certaine originalité. D'autant plus que l'album et l'univers qu'il développe vont épouser, dès la première page, la part de mystère, ou plutôt de fantastique, si on tenait à classer cette BD dans un genre, qui grative autour du personnage.

A ce titre, se côtoient dans cet album une dimension historique certes, mais aussi une esthétique tout à fait gothique et un maximum d'ésotérisme voire de magie. Un savant et rafraîchissant cocktail, que nous ne sommes pas peu fiers de découvrir dans un album par ailleurs très académique dans son format et sa pagination.
En quelques pages, nous voilà donc plongés dans cette ambiance originale, qui pourrait s'apparenter à une version française et plus historique d'un Berserk, dans ses plus grandes qualités - dont un univers riche - comme dans ses réguliers défauts - une hypersexualisation permanante, notamment.

Mais la comparaison devra s'arrêter là. Car malheureusement, Arthus Trivium souffre d'un manque de personnages forts et d'arcs narratifs clairs. Comme le nom de l'album l'indique, l'intrigue se concentre en effet sur l'un des disciples de Nostradamus, plutôt que sur le personnage historique lui-même. Cela permet assurément à l'auteur de fantasmer l'Histoire à sa convenance, et avec un bestiaire fantastique surprenant, notamment.
Seulement, et pour revenir au bémol mentionné, les personnages choisis pour faire avancer l'intrigue peinent à séduire. En 48 pages, il est difficile de rendre attachants trois protagonistes, et de leur offrir un parcours intriguant. Et Arthus Trivium nous le rappelle cruellement : si l'univers développé attire notre curiosité, ses personnages et leurs enjeux nous laisseront sur notre faim.

Pour se consoler, on pourra toujours compter sur les dessins de Juan Luis Landa, qui n'est pas pour rien dans la réussite visuelle de cet album. Assurément, l'univers développé par Arthus Trivium doit beaucoup à son trait et ses couleurs, qui s'imposent comme un hybride réussi entre un très beau classicisme et un dynamisme qui sert parfaitement les nombreuses scènes d'action offertes par cette histoire.
Arthus Trivium est un album doux-amer. D'un côté, on ne peut que se réjouir, en grands dévoreurs d'imaginaire que nous sommes, de son univers, aussi riche qu'original. De l'autre, on ne peut s'empêcher de remarquer que les 48 pages offertes aux auteurs ne leur permettent pas de dégager des enjeux forts et des personnages marquants. Une série à surveiller, puisqu'elle devrait toutefois gagner en puissance dans de prochains tomes !








