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par Elsa - le 12/11/2015
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par Elsa - le 12/11/2015

Le journal des chats de Junji Itô, la critique

Ce n'est plus du tout un secret, un grand nombre de mangakas semblent avoir développé une passion dévorante pour les chats. Ce qui est tout de même un peu étonnant, c'est le nombre de mangas sur le sujet, preuve d'un réel intérêt du public. Non pas qu'aimer les chats, et les mangas humoristiques sur le sujet, soit un mal, mais adopter un chat, et vivre avec, reste un peu toujours la même chose. C'est pourquoi les mangas sur le sujet donnent rapidement l'impression de tourner en rond, s'il nous prend l'envie de tous les lire.

Mais quand c'est Junji Itô, l'un des maitres du manga horrifique, qui met en scène sa cohabitation avec deux félins, on peut s'attendre à un manga un peu....différent. Pour l'anecdote, ce manga est le plus gros succès de l'auteur au Japon.

Le monstre à neuf vies.

© Junji ITO / Kodansha Ltd

Alors que l'auteur savoure la douceur de vivre dans sa nouvelle maison, sa compagne lui annonce une horrible nouvelle : elle compte ramener Yon, le chat qui vit chez ses parents, à la maison. Pire, elle a aussi repéré un adorable chaton, craignant que le pauvre Yon s'ennuie tout seul. Junji Itô aimerait bien protester, mais sa fiancée est particulièrement persuasive (et légèrement diabolique).

C'est ainsi que deux adorables (ou terrifiantes, selon les points de vue) boules de poils intègrent le foyer.

Quand un maitre de l'horreur raconte son quotidien.

Ce pourrait être un manga sur les chatsqui ressemble à tous les autres, mais avec Junji Itô le récit prend une tournure imprévue. Réutilisant les codes du manga horrifique qu'il maitrise évidemment à merveille, il réussit à rendre hilarantes des scènes anodines. La conversation la plus banale prend une tournure angoissante quand elle met des personnages sans yeux ou au visage affreusement déformé. Les chats se transforment en horribles créatures d'une case à l'autre, et à dire vrai tout le monde, chats compris, a l'air possédé dans ce manga.

L'auteur fait aussi preuve de beaucoup d'auto-dérision, en se mettant en scène. À la fois angoissé et de plus en plus gaga de ses chats, il doit gérer ses moments de répulsions et son immense envie d'obtenir leur affection. Car s'il voit Yon et comme des créatures diaboliques, eux lui répondent par un désintérêt presque complet, tout en se montrant terriblement affectueux avec A, sa fiancée. Accentuant le ridicule des situations, il réussit à transformer en moment de malaise des scènes de jeux ou de câlins, et le contraste fait souvent mouche. Malgré le ton très décalé, le fond reste similaire à celui de tous les autres mangas sur le sujet, et on en viendrait à la regretter. Même en étant très fort pour mettre en scène l'horreur, et en jouant de ces codes pour un résultat très drôle, Le journal des chats de Junji Ito reste un manga sur les chats de compagnie, et tourne vite en rond sur un sujet d'un intérêt assez restreint. Même si le titre est court, on a quand même le temps de s'ennuyer un peu, une fois l'effet de surprise passé. D'autant plus que ce manga est assez cher (15,50€). Cela peut s'expliquer par l'édition luxueuse, mais le résultat reste assez léger.

Graphiquement, bien entendu, c'est superbe, et les amateurs de manga horrifique, et de l'auteur en particulier, vont vraiment se régaler. Junji Itô livre des planches parfaitement dérangeantes, qui contrastent parfaitement avec le sujet plutôt mignon. Son trait, que l'on sent très inspiré par le comics underground, allié à l'efficacité et au dynamisme propre au manga, donnent de la saveur à un récit sans réelle densité.

Si Le journal des chats de Junji Ito reste un manga sur les chats finalement assez similaire aux autres, il n'en reste pas moins drôle, et un exercice de style surprenant pour cet auteur culte.

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