Le Pays de la Nuit et autres instants imaginaires, la critique

Ce mois-ci, l'éditeur Nobi Nobi ! nous emmène visiter les doux instants imaginaires de Kenya OHBA.

Magie fugace.

© 2012 Kenya Ohba • SEIDOSHA

Une jeune fille qui vit seule au Pays de la Nuit, une enfant qui reçoit en cadeau un immense caniche nain, une petite fille bien décidée à complètement rentrer dans le rôle de la renarde qu'elle doit interprèter pour le spectacle de l'école, une bille qui montre le monde à l'envers... Dans de courtes histoires, Kenya OHBA nous fait vivre des petits bouts de vie, parfois rêves éveillés, où le quotidien et le fantastique se mêlent avec bonheur.

La poésie du merveilleux.

On cite bien trop souvent Miyazaki à toutes les sauces, pour trouver des filiations plus ou moins tordues. Pourtant ici, le parallèle est bien plus net, et les amateurs des films les plus doux des studios Ghibli devraient se régaler : on retrouve dans ce joli livre cette façon de saupoudrer par toutes petites touches la vie de tous les jours de poésie, d'étrange, en rendant le banal merveilleux, en faisant parler les animaux et en nous racontant la vie à hauteur d'enfant.

Car c'est bien de cela qu'il s'agit ici, l'auteur parvient avec beaucoup de justesse à retranscrire ce que les petits détails de la vie peuvent receler d'effrayant ou de merveilleux dans les yeux d'un enfant. Cette certitude qu'un grand méchant loup les épie, là, caché derrière un buisson, que la forêt n'a jamais de fin et que la maitresse vit à l'école. Il y a beaucoup de poésie dans ces histoires, mais aussi de la douceur, de la tendresse et beaucoup d'humour. Ce sont des petits récits tous simples, mais si légers et délicats qu'on s'en régale page après page. Tout public, cet ouvrage pourra autant plaire à de jeunes lecteurs avides d'aventures fantastiques qu'à des adultes qui veulent à nouveau ressentir cette sensation d'émerveillement propre à l'enfance. Kenya OHBA donne le La, réinvente le monde qui nous entoure et nous invite à nous y promener tout doucement, à ne pas avoir peur des créatures inconnues et à se régaler de chaque rencontre.

Le dessin est lui aussi très doux, rond et adorable tout en étant parfaitement maitrisé. On pourra peut-être regretter que les visages se ressemblent tous un peu, mais cela reste un détail, tant les personnages sont touchants, attendrissants. Les décors occupent une place importante dans les récits, mais aussi dans les cases, rendant la lecture plus contemplative et offrant de superbes planches. Le rythme très lent nous permet de prendre le temps d'admirer les lieux que l'on traverse. Malgré l'apparente simplicité de l'ensemble, la mise en page est riche et réussie, évoquant parfois plus le franco-belge ou le comics que le manga. Petit bémol, un court chapitre est constitué d'illustrations double page qui racontent une histoire, mais la pliure casse souvent le dessin, masquant un peu ce qui se passe au milieu, et il est donc plus difficile de véritablement s'y immerger. 

Le Pays de la Nuit et autres instants imaginaires est aussi, comme toujours avec cet éditeur, un bel objet, soigné jusque dans les détails. Un beau papier épais et une couverture cartonnée inhabituelle mais très plaisante, qui donne au recueil un côté précieux. 

Le Pays de la Nuit et autres instants imaginaires est un très joli livre, recueil de courts récits poétiques et merveilleux, comme une promenade dans le monde des rêves, à hauteur d'enfant.