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par Thierry Soulard - le 5/12/2021
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par Thierry Soulard - le 5/12/2021

Marini noir, Marini burlesque, Marini cliché, mais Marini très efficace

Il y a les bandes dessinées qui font tout pour éviter les clichés. Et il y a celles qui les collectionnent de façon totalement assumée, juste pour le plaisir, et qui proposent quand même une expérience artistique plus que satisfaisante. « Noir Burlesque », de Marini, fait assurément partie de cette seconde catégorie.

L’histoire de Noir Burlesque vous l’avez déjà lue mille fois. C’est celle de Blacksad, ou de mille autres polar se passant dans les années 50 :

Il y a un type à la mâchoire carrée et aux poings d’acier, qui ne se laisse pas marcher sur les pieds et qui séduit les femmes d’un regard.

Il y a une femme fatale aux jambes galbées dont les robes sont pensées pour glisser doucement à terre.

Il y a un grand méchant mafieux qui tient un club de strip-tease, et ses sbires pas très futés plus ou moins hauts en couleurs.

Il y a des flics, qui n’existent qu’en deux versions, véreux ou incorruptibles.

Il y a de l’amour, de la haine, des vieux dossiers qui ressortent, des bastons à mains nues et des fusillades à la mitraillette, des corps qui se dénudent sur scène et des corps qui s’enlacent dans des lits enlacés, des verres de whisky que l’on vide cul sec et des vieux comptes à régler.

Noir, cliché mais efficace

Et tout cela, évidemment, se passe dans une Amérique qui n’existe guère qu’au cinéma, une Amérique des années 50 où tout le monde se balade en voiture (pas encore) de collection, où tout le monde porte des costumes-cravates et des robes d’une élégance folle, où tout est noir et cliché jusqu’à la moelle.

Et on adore. Après tout, tant qu’à s’attaquer à un genre, le film noir, autant y aller à fond dans les clichés, non ? C’est ce que Marini fait ici : plutôt que de s’embarrasser à tenter de renouveler un genre extrêmement codifié, il prend tous les clichés, archétypes et scènes convenues du film noir à l’américaine, et les utilise à fond.

Le résultat : une bande dessinée brutalement film noir, si ce type d’histoire est devenu un genre en soi, c’est qu’il y a là une demande, des attentes, un public qui aime ça – et qui ne sera pas déçu ici.

© Marini / Dargaud

Noir brutal, rouge sensuel

© Marini / Dargaud

Qu’apporte Marini à ce film noir dessiné, alors ?
Du rouge.

Son graphisme, vaporeux, à l’aquarelle, est noir et blanc et rouge. Noir et blanc, le plus souvent, ce qui renforce l’ambiance. Et rouge pour des détails – des robes, du sang, des carrosseries, les cheveux de l’héroïne.

Une idée que Marini n’est pas le premier à utiliser, loin de là (voir par exemple la série Polar, de Victor Santos, chez Glénat, ou Moi, assassin d’Antonio Altarriba et Keko chez Denoël Graphique), mais qui apporte ici une réelle sensualité à son dessin, là ou souvent le rouge est plus utilisé pour souligner la violence.

Ajoutez à cela son trait réaliste mais efficace, et le sens du cadrage qui a fait de lui l’un des grands noms de la bande dessinée actuelle, et vous avez au final une bande dessinée qui à tous les niveaux tient les promesses de sa couverture : Noir Burlesque fait dans le film noir teinté de séduction burlesque, Noir Burlesque est une bande dessinée qui se regarde beaucoup plus qu’elle se lit, Noir Burlesque propose une histoire déjà lue mille fois mais dont on ne se lasse pas, et que les fans de Marini ou de cinéma de genre devraient apprécier à sa juste valeur.

Peut-être seront-ils simplement frustrés de devoir attendre le tome 2, qui terminera cette aventure, et qui devrait sortir l’année prochaine. Pas grave: en attendant, ils pourront relire sans se lasser cette excellente bande dessinée, ou aller découvrir les multiples autres bandes dessinées de Marini.

Noir Burlesque, T1/2, de Marini, Dargaud

Noir Burlesque, tome 1/2, de Marini, sortie Novembre 2021, éditions Dargaud
© Marini / Dargaud
Noir Burlesque, tome 1/2, de Marini, sortie Novembre 2021, éditions Dargaud
© Marini / Dargaud
Noir Burlesque, tome 1/2, de Marini, sortie Novembre 2021, éditions Dargaud
© Marini / Dargaud
© Marini / Dargaud

Crédits © Marini / Dargaud

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